Dans l’étendue d’un désert, sans ombres ni contours, un éclat de poussière à l’horizon suffit à susciter la panique. Les hommes, visages striés de peinture ocre, saisissent des bâtons cérémoniels utilisés comme armes de guerre. A l’arrière, les gamins crient, courent, cherchent du secours dans le regard des mères et de vieillards inquiets aux épaules rentrées. Mais vite, la rumeur de l’attaque s’éloigne. Ce n’était qu’une voiture de passage, perdue sur la route. Le village respire, jusqu’au prochain panache.

Aux confins du Centre-Ouest brésilien, Kurusu Amba est un point infime, indiscernable : une poignée de tentes en plastique et branchages, abritant des indigènes guarani-kaiowa, campant sur des matelas posés à même le sol, malgré le froid. Pas d’électricité, pas d’eau, sinon celle d’un ruisseau saturé de pesticides. Sous une bâche, la tête d’un sanglier à barbe blanche cuit sur un brasero improvisé. Il a fallu près de dix heures au chasseur du jour, armé d’une simple lance et atteint d’une maladie des yeux, pour harponner la bête.

Mais le ciel bleu infini est lourd de menaces. Il y a d’abord celle des capangas, ces hommes de main des fermiers à la gâchette facile quand il s’agit de chasser l’indigène. « On vit dans la peur. Les Blancs nous tirent dessus, à la carabine, presque tous les jours », confie Celia Perreira, 27 ans, une Kaiowa au visage peint de noir de jais. A la première alerte, tout le monde court se mettre à l’abri dans les bosquets. « On y reste toute la nuit sans bouger, au milieu des scorpions et des serpents », raconte-t-elle.

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