La gauche est prise dans des contradictions qui paraissent inextricables. Par deux fois depuis 2022 – la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) puis le Nouveau Front populaire (NFP) –, ses diverses composantes contractent un accord, relevant avant tout du réalisme électoral. Mais rapidement l’attelage ne semble pas viable quand d’autres enjeux apparaissent comme celui de l’exercice du pouvoir. Trop faible et fragmentée, la gauche est condamnée à se rassembler et, trop divisée, elle paraît incapable de gouverner. Comme feu la Nupes, le NFP semble voué à éclater.

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La coalition électorale a une efficacité essentiellement défensive. Elle est indispensable pour faire front au Rassemblement national. Elle est performante quand il s’agit de conserver des groupes parlementaires, les financements publics des partis afférents et donc maintenir des appareils partisans, dans un contexte où le scrutin majoritaire à deux tours impose implacablement le rassemblement – par ailleurs réclamé par les électeurs de gauche, plus unitaires que ses dirigeants.

L’union s’appuie aussi sur de réelles convergences programmatiques et idéologiques qu’Emmanuel Macron a imprudemment sous-estimées en dissolvant l’Assemblée nationale. Le Parti socialiste (PS) a fait le bilan critique du hollandisme et son centre de gravité s’est déplacé vers la gauche. Il y a bien un accord général autour d’un socle programmatique de social-démocratie radicale et écologiste. La mésentente est surtout stratégique. Quels compromis accepter pour gouverner ? Quel électorat prioriser pour faire éclater le plafond de verre sociologique alors que la gauche n’est forte que dans les métropoles ? Comment faire face à la brutalisation et la polarisation de la vie politique qu’exacerbe délibérément La France insoumise (LFI) ?

Stratégie de conflictualisation de LFI

LFI a pris l’initiative du rassemblement en 2022 et l’a reconduit deux ans plus tard. Elle ne peut en faire l’économie. Sa base électorale est trop étroite. Pour autant, Jean-Luc Mélenchon n’a en rien renoncé à sa stratégie de conflictualisation tous azimuts : cliver pour élargir le socle sociologique de la gauche en allant chercher surtout les abstentionnistes déçus – puisque LFI a renoncé à reconquérir les catégories populaires traditionnelles.

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Si le chef de file « insoumis » a besoin de l’union de la gauche, il n’entend la construire et la maintenir qu’à ses conditions. Le dernier double cycle électoral change la donne à gauche : le leadership « insoumis », acquis de haute lutte en 2022, est fragilisé par ce que d’aucuns diagnostiquent un peu hâtivement comme un « retour de la social-démocratie ». Mais Jean-Luc Mélenchon continue à donner le tempo à gauche et imposer son rythme à ses associés rivaux.

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