Les 14 et 15 avril 1994, sur la colline de Murambi, dans le sud du Rwanda, 50 000 Tutsi furent regroupés de force dans une école technique. Quelques jours plus tard, ces hommes, femmes et enfants furent systématiquement assassinés, tués à coups de grenade, de fusil, de gourdin, de machette, dans un déferlement de violence indescriptible. Trente-quatre survivants parvinrent à échapper au massacre, la plupart en feignant la mort au milieu des tas de cadavres.

Au même moment, partout au Rwanda, la chasse aux Tutsi battait son plein et les tueries systématiques se multipliaient, s’inscrivant dans la politique génocidaire du « Hutu Power », qui fit disparaître plus de 10 000 personnes par jour sur cent jours.

Par leur préparation et par la politique qu’ils contribuaient à mettre en œuvre, ces événements répondent parfaitement à la qualification du génocide, ce qui fut confirmé par le Tribunal pénal international pour le Rwanda et par quelques juridictions nationales.

Non-sens juridique

Chacun de ces massacres à travers le Rwanda visait à servir la politique génocidaire telle qu’établie par les aveux de Jean Kambanda, premier ministre de ce « gouvernement des milices » de 1994. Cet élément fondamental dans la définition du crime de génocide est libellé dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, inchangée depuis 1948, comme l’acte « commis dans l’intention de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux… », en l’espèce le groupe ethnique tutsi.

Ce qui est encore frappant, et juridiquement déterminant, c’est la systématisation des assassinats, l’intention génocidaire se doublant naturellement, puisque c’est le but poursuivi, d’une saisie de chaque opportunité de tuer. Une fois la décision de « solution finale » adoptée, l’intention est omniprésente et se réalise dès que possible.

Face à la réalité de la guerre que mène Israël dans la bande de Gaza, l’accusation de génocide apparaît dès lors comme un non-sens juridique, de même que de déduire la qualification de génocide d’une destruction matérielle comme l’écrit, entre autres, dans ces mêmes colonnes, l’historien israélien Amos Goldberg.

Le juriste polonais Raphaël Lemkin (1900-1959), auteur essentiel de la doctrine ayant conduit à l’adoption de la convention de 1948, distinguait déjà, depuis les années 1920, le « crime de barbarie » (archaïsme du crime de génocide) du « crime de vandalisme » (non intégré en droit international pénal), arguant, pour distinguer les deux infractions, qu’il n’est pas assimilable de porter atteinte à une vie humaine et de brûler une bibliothèque.

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