
Un tribunal italien a condamné, jeudi 26 juin, 11 cadres d’une usine de chimie pour avoir déversé des PFAS, des substances surnommées « polluants éternels », dans de l’eau utilisée par des centaines de milliers de personnes. Les peines les plus élevées, dix-sept ans de prison chacune, ont été prononcées contre deux cadres de l’entreprise Miteni, propriétaire de l’usine située dans la ville de Trissino, près de Vicence, dans le nord-est de l’Italie, qui produisait des PFAS depuis 1968.
Selon le parquet, l’usine déversait des eaux usées chargées de produits chimiques dans un ruisseau, polluant pendant plus de quarante ans l’un des plus grands bassins d’eau souterraine d’Europe, sur une vaste zone entre Vicence, Vérone et Padoue.
On recourt depuis la fin des années 1940 aux PFAS (substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées) pour rendre antiadhésives et imperméables les surfaces de toutes sortes d’objets, des poêles aux parapluies en passant par les tapis et le fil dentaire. Plusieurs sociétés ont successivement exploité l’usine de Trissino, qui a fermé en 2018 après avoir fait faillite.
Au total, 15 cadres de Mitsubishi, International Chemical Investors (ICIG) et Miteni étaient poursuivis pour avoir contaminé près de 200 km² d’eau potable, ainsi que les sols environnants. Au cours du procès, ouvert en 2021, les procureurs avaient demandé des condamnations cumulant cent vingt et une années de prison, a expliqué jeudi à l’Agence France-Presse l’avocat Edoardo Bortolotto.
Un « jugement historique », selon Greenpeace Italie
Le tribunal est allé au-delà des réquisitions en condamnant 11 personnes à plus de cent quarante et une années de prison, avec des peines allant de deux ans et huit mois à dix-sept ans, et en a relaxé quatre. Plus de 300 plaignants s’étaient constitués partie civile, comme Greenpeace et un collectif de mères qui avaient découvert des traces de produits chimiques dans le sang de leurs enfants.
Chiara Campione, la représentante de Greenpeace Italie, a salué dans un communiqué un « jugement historique » qui « réaffirme le principe du pollueur-payeur ». « Qui pollue paye », a aussi réagi Luca Zaia, le président de la région de Vénétie, annonçant que les personnes et les entreprises concernées devront verser à la région une compensation de plus 6,5 millions d’euros. Elles devront également indemniser à hauteur de 58 millions d’euros le ministère de l’environnement italien, selon le quotidien Il Giornale di Vicenza.
En mai, un tribunal avait également établi qu’un ouvrier mort en 2014 d’un cancer qui avait travaillé pendant plus d’une décennie dans la même usine avait contracté sa maladie à cause d’une exposition prolongée aux PFAS.
Ces polluants dits éternels, car quasi indestructibles, s’accumulent dans l’air, les sols et les eaux et peuvent avoir, selon des études, des effets néfastes sur la fertilité et favoriser des cancers en cas d’exposition prolongée.