Le livre de Jordan Bardella, dont la parution est prévue le 9 novembre, ne bénéficiera pas de campagne de publicité dans les gares SNCF ou RATP gérées par la régie Mediatransports.
Le président du RN et ses soutiens crient à la censure, arguant que des personnalités comme Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy ont pu en bénéficier dans ces lieux publics avant lui.
Pourtant leurs situations ne sont pas comparables, voici pourquoi.
Pourquoi eux et pas lui ? C’est la ligne que continue de défendre le Rassemblement national, qui crie au scandale et à la censure après que Mediatransports, la régie publicitaire de la SNCF et de la RATP, a décidé de ne pas diffuser dans les gares françaises la campagne de pub du prochain livre de Jordan Bardella . Or selon le député européen et ses soutiens, d’autres hommes et femmes politiques avant lui, par exemple Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, n’ont pu subi le même sort, preuve de l’injustice dont il serait victime. Pourtant, c’est faux.
La polémique débute ce lundi 28 octobre. Mediatransports annonce que la campagne de publicité qu’elle avait négociée avec Fayard, la maison d’édition de Jordan Bardella, à l’occasion de la parution de Ce que je cherche le 9 novembre prochain, ne sera finalement pas diffusée. Le visuel – un portrait de Jordan Bardella barré du titre du livre – contrevient à ses règles de neutralité, « notamment politique », et ne réunit pas les conditions nécessaires à sa diffusion, avance-t-elle. « La promotion de l’ouvrage d’un homme politique en exercice, président d’un parti, porte atteinte à ce principe de neutralité et ne peut donc être acceptée sur nos espaces », justifie Mediatransports. Jordan Bardella « est député européen et président d’un parti politique » et le titre du livre souligne qu’il ne s’agit pas simplement d’un récit autobiographique, justifie encore l’entreprise, qui dans l’article 8 de ses conditions générales de vente (nouvelle fenêtre)précise bien que « tout message publicitaire présentant un caractère politique (…) est prohibé ».
« Pourquoi cette liste de livres politiques a pu bénéficier sans problème d’un affichage en gares ? »
Jordan Bardella y voit de la censure et une victoire des syndicats de gauche de la SNCF qui s’étaient indignés de l’affichage d’une telle campagne dans les gares. Ses soutiens embrayent et vont dans le même sens. Mardi soir sur France 5 sur le plateau de « C à vous », le député de l’Union des droits Éric Ciotti nie que Jordan Bardella puisse être « victime » d’un règlement préexistant à la sortie de son livre et assure que si Jean-Luc Mélenchon avait été dans la même situation, la SNCF aurait fait sa pub dans ses gares. Le journaliste Patrick Cohen lui rétorque alors que « pour prouver qu’il y ait censure, il faut démontrer que d’autres livres politiques de présidents de partis, de chefs de partis, de députés, d’élus en cours de mandat ont pu bénéficier d’une publicité de leur livre politique » dans les gares.
C’est ce que fait Jordan Bardella mercredi soir en lui répondant directement sur X et en publiant ce qu’il pense être des preuves irréfutables. « Patrick Cohen a prétendu, avec aplomb, qu’il n’y avait aucun affichage de livre politique dans les gares SNCF, et que les règles de la régie publicitaire l’interdisaient. Ce n’est pas un fait : c’est un grossier mensonge. Peut-il nous expliquer pourquoi cette liste de livres politiques a pu bénéficier sans problème d’un affichage en gares ? », écrit le député européen avec une liste d’ouvrages. Parmi eux, Ce que je peux enfin vous dire, écrit en 2018 par l’ancienne ministre socialiste Ségolène Royal, ou Le temps des combats, deuxième tome des mémoires de l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy, sorti en 2023.
Hier dans @cavousf5 , face à @eciotti , Patrick Cohen a prétendu, avec aplomb, qu’il n’y avait aucun affichage de livre politique dans les gares SNCF, et que les règles de la régie publicitaire l’interdisaient. Ce n’est pas un fait : c’est un grossier mensonge. Peut-il nous… pic.twitter.com/VRAAhxdaiC — Jordan Bardella (@J_Bardella) October 30, 2024
« Il y a une grosse nuance », se justifie Mediatransports
Ce que Jordan Bardella ne dit pas, c’est qu’à l’époque les deux personnes citées ne sont plus élues, et que leurs ouvrages ne sont pas programmatiques. C’est d’ailleurs la justification qu’avait déjà avancée Mediatransports en début de semaine, et qui vient parfaitement contrecarrer ces exemples. « Il y a une grosse nuance. Il s’agissait là d’un livre de mémoires écrit par un ancien président n’ayant plus de mandat », disait la régie pub sur France Inter à propos du livre de l’ancien président de la République. « Pour Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, il s’agissait d’ouvrages de mémoires, dans un contexte différent du fait de la position de ces personnalités politiques à ce moment-là », ajoutait-elle dans Le Parisien (nouvelle fenêtre). Alors que l’ouvrage de Jordan Bardella est « certes une autobiographie, mais elle est écrite par un homme politique, président d’un parti ».
Quant aux autres ouvrages cités par le chef du RN, ils n’ont rien à voir non plus avec son cas. Pierre de Villiers est un ancien militaire, chef d’état-major des armées jusqu’en 2017 et Gérard Davet et Fabrice Lhomme sont des journalistes d’investigation du journal Le Monde qui ont beaucoup écrit sur la politique, notamment au cours du quinquennat de François Hollande.