C’est l’un des éléments de mobilier les plus célèbres du design : le pied compas en métal, support en forme de V inversé dessiné par Jean Prouvé (1901-1984), dont la structure angulaire associe stabilité parfaite et légèreté visuelle. Utilisé principalement pour des tables et des chaises, le pied compas s’inspire des principes d’ingénierie sur lesquels s’appuyait Jean Prouvé dans ses projets. Ce que l’on sait moins, c’est que cet ingénieur de formation, qui a conçu de nombreuses maisons, a décliné cette forme iconique en architecture. Et notamment au sommet d’une colline du village de Vantoux, dans la campagne lorraine.

C’est à dix minutes en voiture de Metz, juste après les faubourgs de la métropole, que s’étire cette école primaire faite de matériaux industriels : verre, bois, métal et béton. En 1949, le ministère de l’éducation nationale lance un appel à concours pour construire des établissements scolaires – nombreux à avoir été détruits pendant la guerre – auquel répondent Les Ateliers Jean Prouvé, qui ont déjà fait leurs preuves, en 1944, avec leurs pavillons conçus pour les sinistrés de Lorraine et de Franche-Comté.

Le bureau d’études imagine une école rurale à classe unique, avec logement d’instituteur, « un modèle industrialisable dont les éléments doivent pouvoir être fabriqués en grande série, facilement et rapidement montés » quel que soit le terrain, expliquent les héritiers de l’architecte sur le site Internet qui recense l’ensemble des réalisations de ce dernier.

Disposant, avec son usine de Maxéville (Meurthe-et-Moselle), d’un outil de travail performant, poursuivent-ils, « Jean Prouvé voit dans ce programme l’opportunité d’engager un processus de production industrielle de constructions économiques, applicable à plusieurs types de débouchés ». L’école est conçue pour être bâtie en deux semaines, grâce à un système d’assemblage de modules par boulonnages et clips.

Lire aussi | Jean Prouvé, l’archi-ingénieux

Le jeune frère de Jean Prouvé, Henri, architecte lui aussi, prend part à l’aventure. Ensemble, ils remportent le concours et reçoivent, en mai 1950, une commande d’Etat pour deux prototypes, qui seront implantés l’un à Bouqueval, dans le Val-d’Oise, et l’autre à Vantoux, près de Metz. Mais, comme cela sera le cas tout au long de sa carrière, Jean Prouvé essuie l’hostilité de lobbys. « Il ne construira pas d’autres écoles sur ce modèle », explique Nathan Chicheportiche, qui vient d’installer sa galerie d’art contemporain dans cet établissement scolaire qui a fermé voilà dix ans.

Ne pas enfermer les enfants traumatisés par la guerre

Il vous reste 62.55% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Partager
Exit mobile version