En choisissant, pour remplacer Elisabeth Borne, son ministre le plus populaire, réputé pour son sens politique et ses talents de communicant, Emmanuel Macron espérait redonner du souffle à un mandat au point mort et redynamiser une équipe gouvernementale qui s’était épuisée dans les travées du Parlement, à la recherche d’improbables majorités sur chacun des textes examinés. Il s’agissait pour ce président empêché de tenter de masquer l’impasse politique dans laquelle il se trouvait, faute de majorité, tout en s’achetant du temps, reculant le moment où le futur (l’après-macronisme) finirait par éclipser le présent (lui).

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La feuille de route de Gabriel Attal était claire : mettre toute son « énergie » pour appliquer le « projet de réarmement et de régénération », et porter la campagne des européennes afin de contrer le jeune leader du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella. Quatre mois plus tard, même s’il est bien trop tôt pour faire un bilan, le coup politique semble avoir fait long feu. Alors qu’Emmanuel Macron comptait sur la popularité de son premier ministre pour rebooster la sienne, c’est le phénomène inverse qui s’est produit, la courbe du chef du gouvernement pâtissant de l’impopularité du président de la République.

Sur le front de l’action gouvernementale, si Gabriel Attal se démultiplie tous azimuts et ouvre de nombreux chantiers (assurance-chômage, fin de vie, réforme de la justice des mineurs…), il peine à transformer la physionomie du mandat, l’équation politique restant inchangée au Parlement. Lui qui était parvenu, à l’éducation nationale, à rendre la parole performative (sitôt dit, sitôt fait, sur l’abaya) risque de se banaliser, avec des déclarations non suivies d’effets, et des résultats visibles et concrets difficiles à obtenir à court terme. « Les Français ont l’impression que rien ne se passe, avance le directeur délégué d’Ipsos, Brice Teinturier. Gabriel Attal bénéficie d’une image positive, même si celle-ci a tendance à s’étioler, mais à lui seul, il ne peut pas transformer la donne. »

Voie d’eau

Quant à la campagne des européennes, elle patine, avec une liste de la majorité présidentielle à la traîne dans les sondages, loin derrière celle du RN. Tancé par le chef de l’Etat, qui s’agaçait de voir son premier ministre rester prudemment en retrait, M. Attal s’est enfin lancé dans la marmite électorale. Ces dernières semaines, le premier ministre – qui sait qu’une motion de censure à l’automne pourrait stopper net son bail à Matignon – assumait de rester concentré sur l’action gouvernementale, soucieux d’y imprimer sa marque.

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