L’Espagnole Karla Sofía Gascón, 52 ans, est la première comédienne transgenre nommée aux Oscars à Hollywood.
Elle est la vedette de « Emilia Pérez », la comédie musicale de Jacques Audiard qui arrive en tête des nominations.
Un rôle qui fait écho à son propre parcours intime puisqu’elle a fait sa transition de genre en 2018.

Elle est déjà entrée dans l’Histoire du Septième art. Après avoir été primée avec ses partenaires à Cannes et reçu une nomination aux Golden Globes en janvier dernier, l’Espagnole Karla Sofía Gascón, 52 ans, est devenue ce jeudi la première comédienne transgenre nommée aux Oscars pour sa performance dans la comédie musicale Emilia Pérez de Jacques Audiard.

À l’écran, elle incarne Juan « Manitas » del Monte, un narcotrafiquant mexicain qui engage une avocate pour l’aider à effectuer sa transition de genre. Un rôle qui fait écho à son propre parcours. Jusqu’en 2018, sa carte d’identité était au nom de l’acteur Carlos Gascón, avec à son actif de nombreux rôles à la télévision dans son pays de naissance puis au Mexique. 

Au départ, Jacques Audiard songeait faire jouer Juan à un homme et Emilia à une femme. C’est après avoir repéré cette forte personnalité lors d’un casting en vidéoconférence qu’il s’est laissé convaincre de lui confier le rôle d’Emilia, après sa transition. En dépit des réticences initiales du réalisateur français, la comédienne va insister pour jouer le personnage lorsqu’elle est encore un homme, à l’aide d’un impressionnant travail de maquillage.

« Si j’ai un message à envoyer, ce que nous les trans, on est comme tout le monde« , avait lancé l’actrice lors de la présentation du film sur la Croisette. « Qu’on soit LGBT ou ce que vous voulez, on est des gens normaux. Et on peut se consacrer aux carrières que l’on choisit, que ce soit l’enseignement ou le métier d’acteur. On a fait un choix pour notre corps qui nous appartient. Nous avons le droit d’en disposer. »

Elle a porté plainte contre Marion Maréchal

Au soir de son prix d’interprétation, partagé avec ses trois partenaires féminines, Karla Sofía Gascón avait fait l’objet d’un tweet virulent de la part de Marion Maréchal. « C’est donc un homme qui reçoit à Cannes le prix d’interprétation… féminine. Le progrès pour la gauche, c’est l’effacement des femmes et des mères« , s’était insurgée la tête de liste de Reconquête aux élections européennes sur le réseau X.

Dans le sillage de plusieurs associations LGBTQ+, la comédienne allait déposer plainte pour « outrage sexiste en raison de son identité de genre » contre la nièce de Marine Le Pen. « Nous devons en finir avec ce genre de propos« , déclarait-elle alors dans un communiqué. Un combat qu’elle poursuit désormais de l’autre côté de l’Atlantique, où Emilia Pérez a été acheté par Netflix.

Je suis qui je suis, pas celle que vous voulez que je sois

Karla Sofía Gascón lors de son discours aux Golden Globes

Début janvier, Karla Sofía Gascón est devenue la première comédienne transgenre nommée aux Golden Globes. Sur le tapis rouge, elle est apparue radieuse aux côtés de Marisa Gutiérrez, son épouse qu’elle a rencontrée à l’âge de 19 ans et avec laquelle elle élève leur fille de 14 ans. Alors que les votants lui ont préféré Demi Moore dans The Substance, Jacques Audiard lui a laissé le micro devant tout le gratin hollywoodien après avoir remporté le trophée du meilleur film musical.

Karla Sofia Gascon et son épouse Marisa Gutiérrez sur le tapis rouge des Golden Globes le 5 janvier 2025 – AFP

« Vous pouvez peut-être nous mettre en prison, vous pouvez nous rouer de coups, mais vous ne pourrez jamais nous enlever notre âme, notre existence et notre identité !« , a-t-elle lancé, dans une tenue inspirée des couleurs bouddhistes. « Liberté ! Je suis qui je suis, pas celle que vous voulez que je sois« . Des propos très politiques, au moment le retour de Donald Trump à la Maison Blanche suscitait l’inquiétude des personnes trans.

Dans un entretien accordé au Hollywood Reporter il y a quelques jours, Karla Sofía Gascón raconte avoir su qu’elle était une femme dès l’âge de 4 ans. « Je voyais d’autres petites filles et je me disais que je voulais être comme elle. Ou bien je regardais une fille à la télévision et c’est à son personnage que je m’identifiais. » Issue d’un milieu modeste, il lui faudra des années pour assumer son identité au grand jour.

La comédienne répond également aux attaques d’une partie de la communauté LGBT, des internautes mais aussi de l’association GLAAD jugeant le film rétrograde sur la représentation des personnes trans. « Être LGBT ne vous rend pas moins stupide !« , balance-t-elle. « La réalité est dans la rue. Ce sont les gens qui viennent me voir dans la rue pour me remercier. Ils attendent que je sois nommée (aux Oscars – ndlr) et si je reçois le prix, ils sauteront de joie. »


Jérôme VERMELIN

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