Franchement, chapeau à cette artiste qui mérite de figurer à l’affiche du Festival de Cannes. On veut parler de Rachida Dati. On sait que la ministre de la culture est une championne du culot, de la vérité incertaine et de la formule au bazooka. En ce moment, elle va si loin dans la provocation que sa guéguerre avec le monde de la création atteint un point paroxysmique.

En principe, l’argent ne ment pas et pourtant, c’est le budget 2025 qui a déclenché les hostilités. Invitée dans la matinale de France Inter, le 7 mai, Dati, en une scène d’anthologie, a moqué les pleureuses et claironné six fois en deux minutes que son budget était en légère hausse par rapport à 2024. En réponse, les milieux culturels parlent de « mascarade Dati » et dénoncent un budget sabré. Libération juge même la ministre « en phase de trumpisation ».

C’est un classique que d’instrumentaliser les chiffres, mais on n’a jamais vu deux lectures à ce point contradictoires. Cela dure depuis un mois. Les esprits sont si chauds qu’on a demandé leur avis au chercheur Emmanuel Négrier, à l’économiste Françoise Benhamou et à Jean-François Chougnet, le « M. Budget » du ministre Jack Lang dans les années 1980. Ils ont épluché les trois postes-clés – patrimoine, création et actions visant à démocratiser la culture.

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Faisons la synthèse. Le budget de la mission culture est voté en février à 4,8 milliards d’euros, puis raboté en avril de 99 millions d’euros, prélevés sur ce qu’on appelle la « réserve de précaution » – une petite part de chaque subvention à un théâtre ou un musée, que le ministère met de côté en cas d’imprévu et qui peut être débloquée ou non.

Une lecture positive faussée

A l’arrivée, le budget est similaire à celui de 2024. Dati a donc une raison de crier victoire. Sans doute son profil de coriace a-t-il permis de préserver la maison culture par rapport à d’autres ministères, dans un contexte de dette publique abyssale et de crédits guerriers à la hausse. Elle n’a pas tort, non plus, quand elle affirme que, depuis 2017 et l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Elysée, la culture a gagné plusieurs centaines de millions d’euros, dopée entre autres par les aides liées au Covid-19 ; un rapport publié par la Cour des comptes en mars 2024 va dans ce sens.

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