A l’American Saloon de Tarbes, une violente rixe entre « bikers » rivaux avait éclaté, le 18 septembre 2021. L’assaut avait été immédiat et le bilan lourd : un homme, « cerné comme un trappeur par une meute de loups », selon les mots du parquet, était mort, tué de cinq coups de couteau, et six autres blessés, durs à cuire désormais traumatisés, étaient à déplorer. Le porteur de l’arme blanche sera jugé, en juin 2025, pour « meurtre et tentatives de meurtre » par la cour d’assises de la Gironde. Lundi 21 octobre s’est ouvert, à Bordeaux, le procès de douze motards, jugés pour leur implication à divers degrés dans ces violences aggravées et, pour certains, pour leur participation à une association de malfaiteurs.

Au moins deux groupes de motards se sont affrontés le 18 septembre 2021. D’un côté, les Rebels Nomads, un club des environs de Tarbes, créé en 2017, dont faisaient partie le mort et les blessés. De l’autre, les sulfureux Hells Angels, venus de Paris, des Landes ou des Pyrénées-Atlantiques, avec des membres de clubs amis comme les « prospects » – des candidats à devenir Hells – de Toulouse.

L’enquête des policiers a été l’occasion d’une immersion dans ce milieu fermé organisé en « chapitres », sorte de QG – il y en avait huit en France au moment des faits –, et régi par un code d’honneur très strict. Ainsi, pour devenir « full member » ou « full patch » et être autorisé à revendiquer son appartenance à un club et à arborer les couleurs et blasons de sa « famille » sur sa « jacket », un postulant sera d’abord « hangaround » (suiveur), puis « prospect » (candidat), mais peut être récusé à chaque étape, s’il ne fait pas ses preuves en servant les intérêts du club.

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« Il est de notoriété publique que les Hells Angels et les Rebels ne sont pas des groupes amis, résume le premier vice-procureur, Bertrand Rouède. A Tarbes, ce n’est pas une bagarre de rue qui a mal tourné, c’est un guet-apens. Il n’y a pas de fait générateur précis autre que cette rivalité clanique. »

« Chacun est entré dans la mécanique »

Pas de moto rutilante et vrombissante devant le palais de justice de Bordeaux. Les prévenus au gabarit imposant ont troqué le blouson siglé contre un jean et une veste plus sobres, d’où dépassent quelques tatouages. Le silence est un droit en procédure pénale, c’est un devoir érigé en loi chez les Hells Angels. Mais, au fil des auditions et confrontés aux déclarations de témoins, aux films d’amateurs et aux images de vidéosurveillance, les prévenus n’ont pu nier l’évidence de leur présence. Entendus à la barre par ordre d’apparition sur la scène de crime, ils comptent les mots, édulcorent, ne donnent aucune explication à leur geste.

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