« Saint Louis après Jacques Le Goff. Nouveaux regards sur le roi et son gouvernement », sous la direction de Marie Dejoux, PUR, « Histoire », 342 p., 26 €, numérique 13 €.
Louis IX, connu sous le nom de Saint Louis (1214-1270), est un monument de l’histoire de France. Roi de 1226 à sa mort et canonisé en 1297, sa stature en impose. Dans la communauté des historiens, Jacques Le Goff (1924-2014) occupe une place similaire. Fondateur de l’Ecole des hautes études en sciences sociales et directeur de la revue des Annales, il publia en 1996, chez Gallimard, un Saint Louis qui fit date dans la façon d’écrire l’histoire. Le livre collectif Saint Louis après Jacques Le Goff, dirigé par l’historienne Marie Dejoux*, revient sur l’héritage intellectuel de cette œuvre majeure.
Novatrice, la réflexion de Le Goff renversait le genre biographique. Recherchant l’individu derrière la légende, il dévoilait la construction du personnage royal par les auteurs des sources médiévales, qui cherchaient à assurer sa canonisation par l’Eglise. Provocateur, l’historien, devant la difficulté à retrouver l’homme qu’avait été réellement Louis IX, posait la question : Saint Louis a-t-il seulement existé ? Marie Dejoux relève un autre défi : convaincue que bien des aspects ont été laissés dans l’obscurité par Le Goff, elle interroge à la fois l’image du souverain et la méthode de son biographe. S’attaquant ainsi d’un même mouvement à deux figures tutélaires, elle réunit les contributions d’historiens, de juristes, d’un archiviste – nés après 1980 pour la moitié d’entre eux – qui tous ouvrent de nouvelles directions au moyen d’autres types de sources, non narratives.
Dès le XIIIe siècle, de nombreux écrits pratiques documentent en effet le quotidien du gouvernement. Banals en apparence, les actes de justice, les comptabilités, les abondants registres des enquêtes que le roi diligentait dans tout le royaume témoignent des visées du souverain. Longtemps négligé, l’entourage familial du roi renseigne quant à lui sur son environnement politique : l’administration serrée que ses puissants frères Alphonse de Poitiers et Charles d’Anjou faisaient de leurs possessions éclaire la culture capétienne du gouvernement.
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