Des étudiants ayant passé la nuit au siège historique de Sciences Po étaient visibles aux fenêtres du 27, rue Saint-Guillaume, le 26 avril au matin.

Occupation des locaux, sit-in dans la rue, slogans en faveur de la lutte palestinienne… Une petite foule d’étudiants, de militants ou de sympathisants du comité Palestine poursuit la mobilisation propalestinienne, vendredi 26 avril, dans et devant les locaux de Sciences Po Paris, rue Saint-Guillaume.

La tension est montée d’un cran aux alentours de 16 heures, avec l’arrivée d’une cinquantaine de manifestants pro-Israël criant notamment « Libérez Sciences Po » ou « Libérez Gaza du Hamas ». Certains étaient masqués et disposaient de casques de moto. Une bousculade entre partisans des deux camps est survenue au milieu des nombreux journalistes présents. Les forces de l’ordre se sont alors positionnées pour séparer sans violence les deux groupes.

Si des étudiants pro-Gaza avaient commencé à enlever les poubelles qui obstruaient l’entrée du bâtiment, des militants continuent d’occuper le site et un sit-in avait été organisé dans la foulée sur le pavé.

La direction a décidé de fermer plusieurs locaux du campus parisien vendredi. Dans un message à la presse, elle « condamne fermement ces actions étudiantes qui empêchent le bon fonctionnement de l’institution et pénalisent les étudiants, [les] enseignants et [les] salariés ».

Elle a organisé, vendredi matin, une rencontre avec des représentants des étudiants. Le Comité Palestine de Sciences Po réclame notamment « la condamnation claire des agissements d’Israël par Sciences Po » et « la fin des collaborations » avec toutes « les institutions ou entités » jugées complices « de l’oppression systémique du peuple palestinien ». Il demande en outre l’arrêt de « la répression des voix propalestiniennes sur le campus ».

Message de soutien de Jean-Luc Mélenchon

Mercredi soir, une dizaine de tentes avaient été installées dans la cour d’un autre bâtiment de l’établissement, situé 1, place Saint-Thomas-d’Aquin, avant que la police ne vienne déloger les militants et sympathisants de la cause palestinienne.

« Qu’on fasse preuve de solidarité à l’égard des Palestiniens, qu’on montre le rejet des crimes qui sont commis à Gaza, c’est naturel, c’est même digne et c’est noble », a jugé vendredi Raphaël Glucksmann, tête de liste du Parti socialiste (PS) et de Place publique aux élections européennes du 9 juin, sur BFM-TV. « Après, dans quelle atmosphère on le fait ? Est-ce qu’on est inclusifs ? Est-ce qu’on tolère le débat ? Est-ce qu’on est capables d’organiser des discussions avec ceux qui ne partagent pas [ce] point de vue ? Jusqu’ici, jusqu’à preuve du contraire, ce n’est pas le cas. Et donc on a un problème. Et la direction de Sciences Po a le droit de décider d’évacuer », a ajouté M. Glucksmann, par ailleurs ancien élève de l’établissement.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Sciences Po s’embrase après une mobilisation propalestinienne, des insultes entendues et des versions contradictoires

Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Yonathan Arfi, a estimé, vendredi sur LCI, que ce mouvement était « dangereux, car l’université a une fonction symbolique dans nos sociétés. Ce qui se passe dans les universités ne concerne pas que le monde étudiant, mais rayonne sur l’ensemble de notre vie politique et intellectuelle et produit des effets sur une génération ». « Il n’y a rien de massif » mais « ça fonctionne, ça prend en otage le campus entier, ça empêche la liberté académique et fait peser un climat de terreur intellectuelle sur une partie des étudiants juifs », a ajouté M. Arfi.

« On n’a rien contre les étudiants de confession juive, il y a des étudiants juifs qui militent avec nous », a plaidé Hubert Launois, 19 ans, étudiant en deuxième année et membre du Comité Palestine. « Ce qui nous pose un problème, c’est la politique coloniale et génocidaire du gouvernement d’extrême droite israélien », a-t-il ajouté.

Des centaines d’arrestations sur des campus américains

Les étudiants mobilisés ont reçu le soutien du dirigeant « insoumis » Jean-Luc Mélenchon dans un message audio diffusé par le député Thomas Portes (La France insoumise, LFI), venu encourager les manifestants. « Vous êtes à cet instant, pour nous, l’honneur de notre pays », a affirmé l’ancien candidat à l’élection présidentielle. La juriste franco-palestinienne Rima Hassan, candidate LFI aux européennes, s’est elle aussi déplacée pour soutenir le mouvement. « Ces étudiants sont en train véritablement de porter l’honneur de la France », a-t-elle déclaré, en écho aux propos de M. Mélenchon.

« Le débat, oui. Le blocage, non », a déploré la ministre de l’enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, sur BFM-TV, qui a tiré à boulets rouges sur le rôle joué par les « insoumis » dans la mobilisation. Fustigeant « le jeu dangereux » de LFI à des « fins électorales », elle a accusé les meneurs de la contestation d’être des « irresponsables » faisant la promotion de « l’anarchie » sur les campus.

Lire aussi le reportage | Article réservé à nos abonnés Aux Etats-Unis, le campus de Columbia en état de siège sur fond de guerre à Gaza

La mobilisation à Sciences Po Paris survient alors que plusieurs universités américaines – dont les prestigieuses Harvard, Yale ou encore Princeton – sont mobilisées, et parfois occupées, pour protester contre la guerre à Gaza.

Le Monde Ateliers

Cours en ligne, cours du soir, ateliers : développez vos compétences

Découvrir

L’université Columbia, à New York, a ajourné la date limite de vendredi à minuit (6 heures, heure de Paris) fixée aux étudiants propalestiniens pour qu’ils évacuent le campus, occupé pour protester contre la guerre dans la bande de Gaza, a-t-elle annoncé.

Des dizaines d’arrestations ont eu lieu la semaine dernière, après que les responsables de l’université ont fait appel à la police pour mettre fin à une occupation accusée par plusieurs personnalités d’attiser l’antisémitisme. Les manifestations propalestiniennes se sont ensuite poursuivies mercredi sur le campus. Plus de deux cents manifestants ont été arrêtés mercredi et jeudi dans des universités de Los Angeles (Californie), de Boston (Massachusetts) et d’Austin (Texas), où quelque deux mille personnes s’étaient à nouveau rassemblées jeudi.

Le Monde avec AFP

Réutiliser ce contenu
Partager
Exit mobile version