Le 10 novembre, à 11 h 31, les femmes en France ont symboliquement cessé d’être payées pour le reste de l’année. Si le salaire horaire à équivalent temps plein entre les femmes et les hommes était identique, elles pourraient s’arrêter de travailler le 10 novembre et gagner le même salaire annuel qu’elles gagnent aujourd’hui en travaillant jusqu’au 31 décembre.
Ce calcul, que je réalise chaque année depuis neuf ans dans la newsletter « Les Glorieuses », se fonde sur l’écart de salaire moyen à temps plein, qui demeure de 14,2 % en défaveur des femmes (Insee). Même lorsque l’on compare des situations strictement équivalentes, même poste, même expérience, il subsiste un écart inexpliqué de 3,8 %.
Si l’on considère l’ensemble des salariés, tous temps de travail confondus (temps complets et partiels), l’écart grimpe à 22,2 %. Ce chiffre illustre une réalité structurelle : les femmes sont plus souvent cantonnées à des emplois à temps partiel, moins rémunérés, ou concentrées dans des secteurs sous-valorisés économiquement. Leur rémunération moyenne reste donc bien inférieure à celle des hommes.
Et, qui plus est, la convergence des salaires femmes-hommes avance à pas de tortue. A ce rythme, l’égalité salariale ne serait atteinte qu’en 2167. Une telle projection donne le vertige et pose une question fondamentale : sommes-nous prêts à accepter que des générations de femmes continuent d’être lésées économiquement ? A ce que nos filles continuent d’être dépendantes économiquement ?
Le temps de l’action
Ces inégalités ne sont pas qu’une affaire de chiffres : elles ont des conséquences sur la vie des femmes et la société tout entière. Moins de salaire, c’est moins de cotisations pour la retraite, de capacité d’épargne ou d’accès à la propriété, et plus de vulnérabilité face aux aléas de la vie. La liberté personnelle est indissociable de l’indépendance financière, comme le rappelle l’économiste Cecilia Garcia-Peñalosa.
Tant que les femmes ne disposent pas des mêmes ressources économiques, elles ne disposent pas des mêmes choix de vie. Considérer l’indépendance économique des femmes comme un enjeu politique n’est pas une option, c’est une nécessité. Il y va du respect d’un principe républicain fondamental : l’égalité. Pourtant, force est de constater que la question de l’égalité salariale n’occupe pas encore la place centrale qu’elle mérite dans l’agenda politique. Le temps des prises de conscience doit laisser place au temps de l’action.
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