Le premier ministre, François Bayrou, lors de la conférence de presse de présentation de son plan pour le budget 2026, à Paris, mardi 15 juillet 2025.

Plus de vingt ans après la conversion du lundi de Pentecôte en journée de solidarité, travaillée mais pas payée, le premier ministre, François Bayrou, a proposé mardi 15 juillet, lors de la présentation de son plan pour le budget 2026, que « deux jours fériés soient supprimés pour tout le pays ». Il a cité le lundi de Pâques et le 8-Mai, tout en se disant « prêt à accepter d’autres idées ». En augmentant la productivité, la mesure rapporterait « plusieurs milliards » au budget de l’Etat.

« Le lundi de Pâques n’a aucune signification religieuse », a rappelé le chef du gouvernement, alors que cette date est fériée dans plus d’une centaine de pays dans le monde. Le 8-Mai, considéré comme l’anniversaire de la victoire des Alliés en 1945, est devenu une journée de commémoration dès 1946, puis férié à partir de 1953 jusqu’en 1959. Le président François Mitterrand l’avait rétabli férié en 1981.

L’idée a aussitôt fait bondir la numéro un de la CGT, Sophie Binet, qui a jugé que supprimer le 8-Mai serait « très grave ». « On ne parle pas de n’importe quoi, on parle de la suppression du 8-Mai, jour de la victoire contre le nazisme. Alors que l’extrême droite est aux portes du pouvoir (…) le premier ministre nous annonce qu’il va supprimer le 8-Mai. C’est extrêmement grave », a-t-elle déploré auprès de l’Agence France-Presse (AFP).

« Le général de Gaulle a supprimé le 8-Mai férié et il me semble qu’il était plutôt investi dans la victoire contre le nazisme », a ironisé sur X le ministre délégué chargé de l’Europe, Benjamin Haddad.

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Le patron du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, a critiqué une « provocation » et « une attaque directe contre notre histoire, contre nos racines, et contre la France du travail ». « Aucun député RN n’acceptera » cette proposition, a-t-il prévu sur son compte X.

Pour Jean-Luc Mélenchon, leader de La France insoumise (LFI), cette mesure est le « symbole » de la « violence sociale du plan Bayrou ». « La liste des ponctions sur les acquis de notre peuple est égale à ce que les très riches sont dispensés de payer, estime-t-il dans un message sur X. Les deux jours fériés supprimés égalent le revenu de l’impôt sur la fortune que Macron interdit de rétablir. » « Tout cela mérite une censure sans illusions ni palabres », conclut M. Mélenchon.

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« Braquage en bande organisée »

François Bayrou a estimé que le « mois de mai [était] devenu un véritable gruyère, où l’on saute de ponts en viaducs de congés ». « Ce sont des propositions, je suis prêt à en accepter ou en examiner d’autres », a-t-il ajouté, lors d’une conférence de presse – boycotté par les syndicats (CFDT, CGT, FO et CFE-CGC) – lors de laquelle il a dévoilé les grandes orientations du budget 2026, casse-tête financier et politique visant près de 44 milliards d’euros d’économies.

La suppression de deux jours fériés « n’est pas du tout la même chose » qu’« une journée de solidarité dont on ne vérifierait pas vraiment si elle est accomplie ou pas, et qui se traduirait uniquement par des prélèvements sur les entreprises », a en outre insisté le chef du gouvernement, disant vouloir « combattre » le « désenchantement face au travail ». « Il faut travailler plus, il faut que toute la nation travaille plus pour produire et (…) pour que la situation de la France s’améliore », a-t-il insisté.

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« François Bayrou propose donc que le 8-Mai, qui commémore la victoire contre le nazisme, ne soit plus férié. On doit le comprendre comment exactement ? », a fait mine de s’interroger la chef de file des écologistes, Marine Tondelier.

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Le chef de file du Parti communiste (PCF), Fabien Roussel, a, lui, dénoncé sur X un « braquage en bande organisée », avec la volonté de « nous faire travailler gratuitement ». « Supprimer le jour férié du 8-Mai, symbole de la victoire contre les nazis, et remettre en cause notre modèle social hérité du Conseil national de la résistance… Bayrou est assez cohérent, finalement », a écrit sur X Ian Brossat, sénateur (PCF) de Paris.

« Tout ça pour 2 milliards d’euros ?, a réagi de son côté le député LFI Hadrien Clouet. Alors que la seule famille Arnault s’est versé 3,1 milliards de dividendes non taxés en 2024 ? Alors que les actionnaires ont détourné 100 milliards l’année passée ? Que les grandes entreprises ont touché 211 milliards d’aide sans aucun contrôle, soit 60 “journées de travail gratuit au nom de la solidarité” ? Supprimer deux jours fériés, c’est surtout priver des millions de gens de deux moments en famille. » « Réalisons jusqu’où ils sont capables d’aller pour prendre dans nos poches pour donner aux riches », a renchéri Clémence Guetté, députée LFI. « Il faut les arrêter », a-t-elle ajouté.

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