
En retirant d’un geste lent son masque noir, Ali Gombo dévoile la cicatrice qui dévore sa joue droite. Chaque syllabe articulée déclenche une décharge électrique à travers son cerveau, mais il insiste pour témoigner.
Le 27 octobre 2024, alors qu’il rentre de la pêche, des cris provenant de son village situé sur les rives du lac Tchad, entre le Cameroun, le Niger, le Nigeria et le Tchad, lui font presser le pas. A contresens des fuyards, il court pour sauver sa famille et tombe nez à nez avec un combattant de Boko Haram, le groupe djihadiste qui sévit dans la région. « Qui es-tu ? », lui demande l’homme. « Je ne suis que moi », répond Ali. La balle lui explose la mâchoire.
A son réveil, quelques jours plus tard sur un lit d’hôpital, il apprend que sa fille est otage des djihadistes qui, la même nuit, ont infligé une lourde défaite à l’armée tchadienne. Selon les chiffres officiels, une quarantaine de soldats sont tombés, au bas mot, dans l’attaque contre la garnison militaire de Barkaram. Quinze ans après le début de son insurrection, Boko Haram continue de semer la terreur sur les bords du lac Tchad, vaste étendue marécageuse aux méandres sableux.
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