Deux juges d’instruction ont ordonné vendredi 24 janvier que Brice C., 34 ans, soit jugé devant une cour criminelle départementale pour « violences volontaires ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente par personne dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions », soit un crime passible de quinze ans de réclusion criminelle, selon l’ordonnance de mise en accusation consultée par l’Agence France-Presse (AFP).

Il est suspecté d’avoir éborgné le manifestant « gilet jaune » Jérôme Rodrigues avec une grenade à main de désencerclement en janvier 2019 à Paris. Brice C. et un autre fonctionnaire de police, Baptiste R., avaient été mis en examen en janvier 2021 respectivement pour la mutilation de Jérôme Rodrigues avec une grenade de désencerclement et pour une blessure à la jambe par un tir de lanceur de balles de défense (LBD) d’un de ses amis, Michaël, lors de l’acte XI des « gilets jaunes », le 26 janvier 2019.

« Cette décision est l’aboutissement du combat des victimes de violences policières pendant le mouvement des “gilets jaunes” », a réagi auprès de l’AFP Arié Alimi, l’avocat de Jérôme Rodrigues, 45 ans, qui a définitivement perdu l’usage de son œil droit. « Derrière le policier qui sera jugé en cour criminelle, c’est la police nationale, la Préfecture de police de Paris et la politique d’Emmanuel Macron pendant le mouvement des “gilets jaunes” qui seront jugés », a-t-il ajouté.

Lire l’analyse (2019) | Article réservé à nos abonnés La blessure à l’œil du « gilet jaune » Jérôme Rodrigues inquiète le gouvernement

L’avocat soutient un tir « en état de légitime défense »

En revanche, les juges d’instruction ont ordonné un non-lieu en faveur du second fonctionnaire de police soupçonné d’avoir blessé à la jambe Michaël, un ami de Jérôme Rodrigues, par un tir de LBD.

Le 26 janvier 2019, ces policiers, membres de compagnies d’intervention, intervenaient dans le cadre d’une manifestation tendue des « gilets jaunes », place de la Bastille à Paris. De nombreux jets de projectiles de manifestants sur les forces de l’ordre avaient nécessité l’usage d’un engin lanceur d’eau et de grenades lacrymogènes, rappellent les deux magistrats. C’est dans ce contexte que Jérôme Rodrigues avait été blessé à l’œil.

L’avocat de Brice C. a soutenu qu’il avait agi « en état de légitime défense », le lancer de grenade étant intervenu « dans un contexte insurrectionnel » et « en direction de personnes qui portaient atteinte à l’intégrité physique des policiers », est-il précisé dans l’ordonnance.

Mais les témoignages et les vidéos analysées lors des investigations ont permis d’établir que « le groupe au sein duquel évoluait Jérôme Rodrigues n’était pas violent » donc ne constituait pas « un attroupement violent (…) susceptible de permettre l’usage de la force publique », ont considéré les juges d’instruction.

Ce procès criminel serait parmi les premiers concernant les violences commises par des policiers lors des manifestations des « gilets jaunes » qui ont débuté à l’automne 2018. Un autre policier, Fabrice T., sera également jugé par la cour criminelle départementale de Paris pour avoir éborgné avec une grenade lacrymogène Manuel Coisne en novembre 2019.

Le Monde avec AFP

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