Le président français recevait ce mercredi à Paris son homologue syrien Ahmad al-Chareh, une première dans un pays occidental pour le nouveau dirigeant.
Il s’est dit favorable à revenir sur les sanctions européennes contre la Syrie, mais à condition que les nouvelles autorités réussissent à stabiliser le pays.
Il a aussi appelé le président syrien à poursuivre en justice les auteurs de récents massacres qui ont touché les communautés druzes et alaouites.

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Syrie : la difficile transition après la chute de Bachar al-Assad

C’est la première visite du nouvel homme fort de Damas en Occident. Emmanuel Macron a accueilli mercredi 7 mai à Paris le président syrien Ahmad al-Chareh (nouvelle fenêtre), l’occasion d’annoncer que la France est favorable à une « levée progressive » des sanctions européennes contre la Syrie, si son dirigeant parvient à stabiliser le pays. Dans le même temps, il a aussi demandé à son homologue de tout faire pour protéger « tous les Syriens sans exception ».

Cette visite a en effet déclenché la controverse, à cause de tueries perpétrées depuis mars en Syrie. Des massacres qui ont fait 1.700 morts, majoritairement alaouites (nouvelle fenêtre), dans l’ouest du pays en mars, de récents combats avec des druzes (nouvelle fenêtre), et des sévices documentés par des ONG ont soulevé des doutes sur la capacité des nouvelles autorités à contrôler certains combattants extrémistes qui leur sont affiliés. Elles ont pris le pouvoir depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre 2024. Plusieurs dizaines de membres des minorités religieuses syriennes ont d’ailleurs manifesté mercredi la place de la République, à Paris.

Emmanuel Macron a semblé répondre à ces critiques en demandant à Ahmad al-Chareh de « tout mettre en œuvre pour assurer la protection de tous les Syriens sans exception, quelles que soient leur origine, leur religion, leur confession, leurs opinions ». Il lui a aussi dit qu’il devait « s’assurer que les auteurs » de ces récentes violences interconfessionnelles visant des druzes et des « massacres » de membres de la minorité alaouite soient « poursuivis et jugés »

Emmanuel Macron « n’ignore pas » les récentes « flambées de violences »

Il a plaidé pour que l’Union européenne « sanctionne systématiquement les auteurs de ces crimes ». « Je n’ignore pas les flambées de violences ces derniers jours », a-t-il assuré, reconnaissant qu’un « chemin de la paix civile et de la concorde » restait à trouver. « C’est à une transition pacifique, qui prend en compte l’intégralité de sa société civile, que nous voulons parler », a-t-il martelé.

En revanche, le président français a plaidé pour une poursuite de « la levée progressive des sanctions économiques européennes » si la coalition islamiste au pouvoir stabilise son pays. « La stabilité en Syrie est bonne pour toute la région et pour notre sécurité », a encore estimé le chef de l’État. 

Il a par ailleurs fustigé des « postures à des fins politiciennes » de la droite et de l’extrême droite françaises, qui ont vivement critiqué cette rencontre en raison du passé jihadiste d’Ahmad al-Chareh (nouvelle fenêtre). Des propos destinés à « parler à des électorats », a-t-il tancé. Le dirigeant syrien « a mis fin à un régime que nous avions condamné, combattu, dont nous connaissons la responsabilité et il est prêt à s’engager », a-t-il poursuivi, assurant que « les premiers actes ont conduit à des résultats »

Le président syrien Al Charaa reçu à l’ElyséeSource : TF1 Info

Emmanuel Macron a par ailleurs appelé les États-Unis à lever, eux aussi, rapidement les sanctions et à ne pas retirer ses militaires antijihadistes trop vite. Il les a appelés à « se précipiter pour lever des sanctions », « avec des exigences », et à « maintenir » ses opérations militaires contre le groupe État islamique dans le pays. Washington avait annoncé le mois passé réduire de moitié ses effectifs (nouvelle fenêtre) en Syrie.

Quant à Israël, il a qualifié de « mauvaise pratique » les récentes frappes israéliennes en Syrie, jugeant qu’elles ne garantiront pas « dans la durée la sécurité d’Israël ». « On n’assure pas la sécurité de son pays en violant l’intégrité territoriale de ses voisins », a-t-il lancé. 

« Pas de place pour les confrontations confessionnelles », assure Ahmad al-Chareh

La sécurité des Syriens est la « première priorité », a répondu de son côté Ahmad al-Chareh. Il a aussi martelé qu’il n’y aurait « pas de place pour les confrontations confessionnelles » en Syrie, et a estimé avoir « prouvé » être « un partenaire fiable pour la lutte contre le terrorisme ». Le dirigeant syrien a estimé ainsi que « rien ne justifie » que les sanctions européennes contre son pays, imposées au pouvoir de Bachar al-Assad, soient maintenues. 

Le président, qui a longtemps dirigé le groupe armé Hayat Tahrir al-Sham issu de l’ex-branche d’Al-Qaïda en Syrie, a aussi tenu à se démarquer des « actes terroristes », notamment de ceux menés en France par des jihadistes passés en Syrie.

Un peu plus tôt, la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a défendu sur franceinfo (nouvelle fenêtre) l’invitation du président syrien, assurant que la France n’a « aucune naïveté » à son sujet. « Nous avons des exigences vis-à-vis de ce nouveau régime, mais nous devons parler, c’est une question de responsabilité. (…) Dialogue, ce n’est pas cautionner un certain nombre de choses », a-t-elle insisté. 

Invité sur TF1 ce mercredi matin (nouvelle fenêtre), le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot a lui assuré que « nous ne faisons pas de chèque en blanc, nous jugeons sur les actes ». « Si nous faisons venir (le président syrien), c’est précisément pour lui demander d’aller plus loin sur la lutte contre l’impunité », a-t-il lancé, notamment en traduisant en justice les responsables des massacres contre « les communautés alaouites » et « les druzes »

M.L. avec AFP

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