
La Cour suprême de Thaïlande a jugé, mardi 9 septembre, que l’ancien premier ministre, Thaksin Shinawatra, devait être emprisonné immédiatement, et ce pour un an, en plein tournant pour son clan politique écarté du pouvoir. Condamné à huit ans d’emprisonnement pour corruption, l’homme politique le plus influent du pays n’avait passé que six mois en détention, à l’hôpital, après son retour d’exil, en 2023.
La Cour suprême a jugé mardi qu’il n’avait pas correctement purgé sa peine d’emprisonnement. « L’avoir envoyé à l’hôpital n’était pas légal, l’accusé sait que sa maladie ne constituait pas un problème urgent, et être resté à l’hôpital ne peut compter comme une peine de prison », a-t-elle exposé dans sa décision. Elle a ordonné l’incarcération immédiate à Bangkok de cette figure de la vie politique nationale.
Une centaine de policiers étaient mobilisés mardi matin devant la Cour suprême, où une poignée de partisans de M. Shinawatra se sont rassemblés. « Mon père reste un chef spirituel, que ce soit par sa fonction politique passée, ses contributions pour le pays ou son intention sincère de participer à l’amélioration de la vie » des Thaïlandais, a déclaré sa fille Paetongtarn, ex-première ministre, destituée à la fin d’août, à l’extérieur de la Cour suprême.
Un retour au pouvoir fragilisé par les revers
La famille Shinawatra domine la vie politique thaïlandaise depuis deux décennies. Elle a longtemps été l’ennemie jurée de l’élite favorable à l’armée et au pouvoir royal, qui considérait son populisme comme une menace pour l’ordre social traditionnel.
La dynastie est revenue au pouvoir en 2023, mais des revers juridiques et politiques l’ont mise à mal dernièrement. Un nouveau gouvernement a été formé vendredi sans inclure le parti lié à la famille, le Pheu Thai, après l’éviction de Paetongtarn Shinawatra, fille de Thaksin, accusée d’avoir manqué de respect à l’armée en pleine crise entre la Thaïlande et le Cambodge.
Son père, premier ministre de 2001 à 2006, avait été condamné à huit ans d’emprisonnement pour corruption et abus de pouvoir, qu’il n’a jamais purgée en prison. Revenu d’un long exil à l’étranger, en août 2023, Thaksin Shinawatra a séjourné dans une chambre privée d’un hôpital de la police de Bangkok. Puis, en février 2024, une grâce royale a réduit sa peine à un an d’emprisonnement, avant sa libération anticipée par égard pour son âge.
Le transfert à l’hôpital de M. Shinawatra et la date de son retour d’exil – qui coïncidaient avec la formation d’un nouveau gouvernement dominé par le Pheu Thai – ont nourri les suspicions quant à un traitement de faveur dont l’ex-premier ministre aurait bénéficié.
Nouvelles élections législatives sous quatre mois
Une enquête a été ouverte en avril par une division de la Cour suprême. Des responsables pénitentiaires et médicaux ont été interrogés afin de déterminer si la peine de Thaksin Shinawatra avait été purgée correctement.
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L’arrêt de la Cour suprême est rendu quelques jours après le renversement du Pheu Thai, au gouvernement depuis 2023. Une coalition menée par un ancien allié du parti familial, Anutin Charnvirakul, a finalement pris les rênes du pouvoir la semaine dernière.
Il n’y aura « ni favoritisme, ni persécution, ni vengeance » à l’encontre de M. Shinawatra, a promis le nouveau chef du gouvernement, tout en assurant qu’il organiserait de nouvelles élections législatives sous quatre mois.
Thaksin Shinawatra est revenu en Thaïlande lundi en jet privé, après quelques jours passés hors du pays qui avaient alimenté des rumeurs dans la presse nationale d’une possible fuite à l’étranger. Il avait promis d’assister à l’audience de la Cour suprême en personne.
M. Shinawatra, 76 ans, a été acquitté à la fin d’août à l’issue d’un procès pour crime de lèse-majesté, concernant des propos publiés en 2015 par un média sud-coréen. Il encourait pour ces faits jusqu’à quinze ans d’emprisonnement.