
Attaqués par les médias dans le giron de Vincent Bolloré – dont CNews, Europe 1 et Le Journal du dimanche (JDD) – après la publication d’une vidéo impliquant Thomas Legrand et Patrick Cohen, les groupes publics France Télévisions et Radio France ont décidé de répliquer publiquement. Dans une lettre commune envoyée à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), mercredi 17 septembre, les présidentes des deux groupes publics, Delphine Ernotte Cunci et Sibyle Veil, dénoncent une « campagne de dénigrement » de ces médias d’extrême droite.
« France Télévisions et Radio France font actuellement l’objet d’une campagne de dénigrement systématique et quotidienne par un autre groupe de médias, en particulier sur les antennes de la chaîne de télévision CNews et de la station de radio Europe 1 », écrivent-elles dans cette lettre consultée par l’Agence France-Presse. Les deux présidentes doivent être entendues par le régulateur de l’audiovisuel au sujet de cette affaire dans l’après-midi.
« Le caractère outrancier et déséquilibré de cette campagne dépasse désormais le simple débat d’opinions : il contribue à miner la confiance dans l’information de service public, à relativiser la responsabilité de l’acte d’informer – qui suppose honnêteté et rigueur – et, ce faisant, à fragiliser la qualité du débat démocratique », poursuivent les deux dirigeantes.
« Certains des propos dénigrants relevés sur les antennes » de CNews et Europe 1 « ont occupé ces derniers jours un temps d’antenne très significatif (…) et nous aimerions connaître votre position sur le sujet », ajoutent-elles en interpellant le président de l’Arcom, Martin Ajdari.
Accusations de connivence avec le Parti socialiste
L’affaire est partie d’une vidéo diffusée au début de septembre par le média d’extrême droite L’Incorrect, qui a suscité une vive polémique politico-médiatique. Filmée en juillet dans un restaurant parisien, elle montre Thomas Legrand, chroniqueur à Libération et France Inter, et Patrick Cohen, qui intervient sur France Inter et France 5, échanger avec deux responsables du Parti socialiste (PS). Au cours de cette discussion, Thomas Legrand déclare : « Nous, on fait ce qu’il faut pour [Rachida] Dati, Patrick [Cohen] et moi. »
La séquence a valu aux deux journalistes des accusations de connivence avec le PS et de parti pris contre la ministre de la culture démissionnaire. Auprès du Monde, les éditorialistes s’étaient défendus de toute conspiration. Sous pression, Thomas Legrand a annoncé quitter son émission, mais pas France Inter.
Depuis son déclenchement, cette affaire a été amplement commentée sur CNews, Europe 1 et Le JDD, tous dans le giron du milliardaire breton Vincent Bolloré, qui y ont vu un signe de parti pris politique du service public. Ces derniers mois, ces médias ont déjà fréquemment reproché à l’audiovisuel public de pencher à gauche, notamment dans son traitement des questions d’immigration et d’insécurité. Jusqu’à ces derniers jours, les groupes publics n’avaient jamais directement répondu, avant de changer de stratégie.