Scandaleux, fins politiques ou dotés d’une fibre sociale : l’histoire de la papauté est façonnée par des figures aussi diverses que passionnantes, comme le montrent ces trois livres parus récemment.

Les frontières d’un discours. Les papes et l’accueil de l’étranger, de Jacques-Benoît Rauscher, Cerf, 192 pages, 18 euros

Quelque chose « ne passe pas » dans le discours général du pape François sur l’accueil des migrants, constate le dominicain Jacques-Benoît Rauscher, qui cherche à prendre au sérieux les inquiétudes de fidèles qu’il refuse de réduire à des « catholiques réactionnaires ». Assumant lui-même une attitude critique envers la modernité, cet enseignant de théologie morale réfléchit à ce sujet en se plongeant dans les discours papaux et les origines de la doctrine sociale de l’Eglise, fixée par Léon XIII en 1891 avec son encyclique Rerum novarum.

Explorer les « tensions profondes » qui traversent la position du catholicisme conduit Jacques-Benoît Rauscher à un essai de généalogie des figures du migrant, depuis le « migrant travailleur » du XIXe siècle au « migrant réfugié » du XXe. Ces mutations expliquent à ses yeux certains anachronismes dans le discours officiel actuel : le propos pastoral du XIXe siècle destiné aux migrants travailleurs a largement demeuré, malgré les mutations de l’exil.

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Déclinant ensuite les figures bibliques de l’étranger, Jacques-Benoît Rauscher dégage une « deuxième frontière », liée à l’universalité du message évangélique, ouvrant à un accueil total que nuancera plus tard la tradition de l’Eglise. S’inscrivant dans cette lignée, et s’appuyant en particulier sur saint Thomas d’Aquin, Jacques-Benoît Rauscher propose à son tour deux pistes – sur le seuil de possibilité matérielle de l’accueil et le lien social face à l’intégration de l’autre – en vue d’approfondir la doctrine sociale de l’Eglise à l’aune des enjeux du XXIsiècle. Y. B.

« Les frontières d’un discours. Les papes et l’accueil de l’étranger », de Jacques-Benoît Rauscher, Cerf, 192 pages, 18 euros

Pie VII. Le pape qui défia Napoléon, de Xavier Maréchaux, Passés/Composés, 312 pages, 23 euros

Certains papes ont façonné le sens de l’histoire, d’autres l’ont subi. Pie VII (1742-1823) lui a opposé une résistance farouche. L’historien Xavier Maréchaux propose ici une « biographie politique » de ce souverain pontife célèbre pour son opposition à Napoléon Bonaparte, qu’il a certes accepté de sacrer empereur (le 2 décembre 1804, à Notre-Dame de Paris), lequel le fera néanmoins enfermer dix-neuf mois à Fontainebleau, entre 1812 et 1814, pour le punir de ne pas se plier à sa pleine volonté.

Le professeur à la State University de New York dit chercher à comprendre, dans la « personnalité hors du commun » de Barnaba Chiaramonti, nom civil de ce pape natif de Cesena (Romagne), « ce qui l’a préparé à affronter les nombreux défis » de sa carrière ecclésiale, de l’invasion du nord de la péninsule italienne par la France révolutionnaire en 1796 à la signature du concordat avec la France en 1801, en passant par ses relations tourmentées avec Napoléon, à qui il refuse, malgré la menace militaire que l’Empereur fait peser sur les Etats pontificaux, de prêter main-forte face à l’Angleterre et de soumettre son pouvoir « temporel ».

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