Le WWF publie un rapport alarmant sur la santé des rivières en France.
Selon les données de l’ONG, seulement 43,1% des cours d’eau et des plans d’eau sur le territoire sont en bon état écologique.
Une situation qui met en danger des espèces emblématiques de l’Hexagone, comme la truite de rivière ou le grèbe huppé.

Les cours d’eau de France sont en danger. C’est le message d’un rapport publié ce mercredi 22 mai par le WWF. Intitulé « Pour des Rivières Vivantes », il alerte sur le fait que « près de 56,9% des eaux françaises ne sont pas en bon état écologique » et ce, « malgré les dépenses déployées pour les politiques de l’eau, estimée à 500 milliards d’euros depuis 20 ans »

Les plus touchés sont les petits cours d’eau en milieu rural (majoritaires sur les 620.000 km de rivières du pays), alors que la qualité des fleuves en aval des grandes villes s’améliore. Une situation qui s’explique par la mise en place de systèmes d’assainissement et de stations d’épuration pour ces derniers, mais au développement d’un « système agricole productiviste » et à l’artificialisation autour des rivières et ruisseaux des campagnes. 

Ceux-ci voient leurs lits modifiés, subissent des apports de pesticides, phosphates ou nitrates, la construction de barrages, des rejets de micropolluants ou se retrouvent victimes de prélèvements d’eau excessifs. Des pratiques qui les endommagent « sévèrement », pointe le rapport du WWF France. Avec une conséquence majeure : la mise en danger d’écosystèmes entiers et d’espèces animales emblématiques du pays.

Destruction d’habitats et sécheresse

L’ONG a observé le déclin de 0,4% des populations de poissons et d’oiseaux d’eau douce sur ces 20 dernières années. Un chiffre qui peut « paraître anecdotique », note Yann Laurans, directeur des programmes de WWF France dans un communiqué. « Pourtant, c’est une donnée inquiétante », alerte-t-il, rappelant que malgré tous les efforts déployés depuis les années 2000, « l’état écologique des rivières ne progresse pas comme nous pourrions nous y attendre ». Deux espèces sont particulièrement impactées par ce phénomène : le grèbe huppé, dont la population a chuté de 91% en 20 ans, et la truite des rivières, avec -44%. 

Les populations de grèbes huppés – grand oiseau plongeur à la huppe noire – sont en régression depuis une ou deux décennies dans de nombreuses régions. Certains sites historiques, comme le lac du Der ou les grands lacs de l’Aube, ont vu leurs effectifs divisés par deux, voire trois, depuis le début du XXIe siècle. Une baisse qui peut s’expliquer par la répétition des épisodes de sécheresse pour cet oiseau qui habite les eaux stagnantes, douces ou saumâtres, de profondeur comprise entre 50 cm et 5 m. Ses zones de reproduction ont également été largement réduites ces dernières années avec la pêche et le développement des activités nautiques. 

Concernant la truite des rivières, ses populations sont particulièrement touchées par les modifications des lits des cours d’eau. « La truite a disparu de plusieurs rivières françaises car les agressions portées sur les cours d’eau font que les conditions ne sont plus vivables pour assurer l’ensemble du cycle de vie de cette espèce », relève le WWF, qui cite en exemple l’approfondissement et l’élargissement des cours d’eau qui induit une « diversité d’habitats très faible, voire unique, avec un réchauffement des eaux rapides et un fond envasé », peu propices à son développement. 

Le danger des espèces invasives

Une situation d’autant plus alarmant que, dans le même temps, les populations d’espèces invasives comme le poisson-chat, le ragondin ou l’écrevisse de Louisiane ne cessent de se développer. Des animaux qui peuvent provoquer d’importants dégâts, transmettre des maladies et conduire d’autres espèces endémiques au bord de l’extinction. Pour tenter d’inverser la tendance, le WWF appelle à « réaffirmer l’objectif français de préserver et de restaurer 25.000 km de cours d’eau et leur continuité à l’horizon 2030 ». Et pour atteindre ses objectifs, l’ONG relance sa « stratégie d’acquisition foncière », pour laquelle elle se dit prête à investir cinq millions d’euros. 

« Les pressions exercées par l’homme sur cet écosystème pour continuer à nourrir un système agricole productiviste, mettent aujourd’hui en danger certaines espèces. Depuis des années, le WWF se mobilise pour enrayer ce déclin, notamment grâce à des programmes de préservation des zones humides », rappelle ainsi Yann Laurans. « Mais nous avons aussi besoin de mobiliser les pouvoirs publics : seule la mise en place d’une politique de l’eau ambitieuse permettra de préserver cette ressource indispensable. »


Annick BERGER

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