Kakhramonjon Olimov retrousse les manches de son élégante chemise en lin jaune moutarde, dévoilant les marbrures sur la peau de son bras. A l’Hôtel-Dieu, à Paris, le médecin qui l’a examiné le 25 juin a noté de nombreuses ecchymoses et des lésions mais ce ressortissant ouzbek de 48 ans s’est surtout plaint d’une « hypervigilance », de difficultés à s’endormir et de réveils en sursaut au milieu de la nuit.
« Ça n’a pas été très agréable pour lui mais au moins, c’est passé », traduit le secrétaire particulier de ce multimillionnaire, rencontré par Le Monde. Un kidnapping en règle dans les beaux quartiers de Paris, une odyssée clandestine jusqu’au sous-sol d’une villa niçoise, des coups et des menaces, un simulacre d’égorgement : depuis le 23 juin, le magnat de la finance se retrouve malgré lui au centre d’un imbroglio digne d’un roman d’espionnage, dont l’arrière-plan laisse interdites la police et la justice françaises.
Actionnaire unique d’Anorbank, un établissement qui revendique la gestion de plus d’un milliard d’actifs et figure, selon lui, « dans le top 10 des banques dans [son] pays », M. Olimov est aussi impliqué, via une société immatriculée aux Pays-Bas, dans un projet de « centrale à cycle combiné gaz » à Surkhandaria, dans le sud de l’Ouzbékistan, au côté d’EDF.
« Viens, on doit parler »
C’est précisément la raison pour laquelle cet habitué de Paris, où il se rend fréquemment, avait prévu un nouveau voyage fin juin, afin de faire le point avec ses partenaires français. Peu d’interlocuteurs sont mis dans la confidence du déplacement : un notaire – il compte profiter de l’occasion pour finaliser l’achat d’un bien immobilier –, un futur collaborateur, des dirigeants d’EDF et l’hôtel Sofitel Arc-de-Triomphe, où neuf nuitées ont été réservées.
Le 21 juin, M. Olimov et son secrétaire s’envolent de l’aéroport international Islam-Karimov, à Tachkent, et gagnent Paris le jour suivant, après une escale à Istanbul. L’après-midi même, une inconnue l’aborde au bar de l’hôtel. Elle s’exprime en russe et en anglais, dit s’appeler Anastacia et travailler dans un salon de beauté en Turquie, mais l’Ouzbek tique : veste Louis Vuitton blanche, bracelet Tiffany, « le luxe qu’elle portait sur elle ne correspondait absolument pas à son métier ».
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