Les sénateurs Christine Lavarde (Les Républicains) et Pierre Barros (Parti communiste), rapporteur et président de la commission d’enquête sénatoriale sur les missions des agences, opérateurs et organismes consultatifs de l’Etat, à Paris, le 3 juillet 2025.

Une commission d’enquête du Sénat pointe, jeudi 3 juillet, un « archipel » d’agences et d’opérateurs mal connus de l’Etat et déplore son « absence de vision » quant aux coûts réels de ces structures. La commission n’écarte toutefois pas la faisabilité d’économies de plusieurs milliards d’euros, mais pas à « missions constantes ».

Les travaux de cette commission étaient particulièrement scrutés et ses résultats attendus alors que les annonces du premier ministre, François Bayrou, prévues à la mi-juillet, doivent poser les bases du débat budgétaire – qui s’annonce périlleux.

Aux termes de ces travaux, les sénateurs ont dressé un panorama de 434 opérateurs, 317 organismes consultatifs et 1 153 organismes publics nationaux ; un « archipel aux frontières floues » dont les contours précis ne sont pas connus par l’Etat lui-même, selon le rapport de la commission d’enquête.

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Des conclusions qui, adoptées largement mais sans le soutien des sénateurs socialistes et écologistes, rejoignent en partie les constats effectués par le premier ministre lors de son discours de politique générale sur le dédale que constitue le millier d’agences et d’opérateurs en France, un « labyrinthe dont un pays rigoureux peut difficilement se satisfaire ».

« Les agences sont le symptôme d’un Etat qui ne se pilote plus lui-même. L’architecture administrative est devenue tellement illisible, éclatée, que même les gestionnaires publics ne s’y retrouvent plus », a lancé Christine Lavarde (Les Républicains) lors d’une conférence de presse.

« Milliards possibles »

Le rapport dénonce des carences dans « la capacité de pilotage » de certains de ces opérateurs par le pouvoir exécutif et recommande de renforcer la tutelle de l’Etat, notamment par l’intermédiaire des préfets. « Au risque de décevoir ceux qui voyaient dans ce travail des milliards d’économies, vous aurez beau chercher, vous ne trouverez pas. Donc pas de serpe, pas de hache », a lancé le président de la commission, Pierre Barros (Groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste – Kanaky).

Une allusion aux déclarations de la ministre des comptes publics, Amélie de Montchalin, qui avait déclaré vouloir effectuer 2 à 3 milliards d’euros d’économies en supprimant ou fusionnant un tiers des opérateurs d’ici à 2027, hors universités.

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« Tous ceux qui annoncent des milliards d’économies en parlant des agences mentent un peu aux Français », car « ce n’est pas la coquille qui fait le coût de l’action publique, ce sont les actions que porte cette coquille », a déclaré Mme Lavarde.

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Selon le rapport, la ministre « n’a pas été en mesure de préciser à la commission d’enquête la façon dont ce calcul avait été réalisé ». Pour autant, les sénateurs jugent que des économies sont envisageables par une « meilleure organisation », par la mutualisation de certaines « fonctions supports », comme le recrutement, la gestion des carrières, etc.

Par ces seules réorganisations sur une trajectoire de deux ou trois ans et en adoptant une approche « très volontariste », on pourrait seulement parvenir à des économies à hauteur de 540 millions d’euros. Une goutte d’eau en comparaison des 40 milliards d’euros d’économies que le gouvernement espère pour son budget 2026. « Ces milliards [d’économies], ils sont possibles. Mais je le redis, ce sont des milliards qui seront pris sur les politiques publiques et sur les subventions », a répété Mme Lavarde.

Une soixantaine de recommandations

Le rapport soumet en outre une soixantaine de recommandations pour améliorer la « lisibilité de l’action publique » et « faire parler l’Etat d’une seule voix ». Le Sénat propose ainsi de « créer une vraie base de données budgétaires pour pouvoir suivre ces agences », ou encore d’imposer « l’exercice d’une tutelle unique sur chaque opérateur ».

Il suggère enfin une « rationalisation intelligente », en instaurant par exemple un moratoire sur la création de nouvelles entités. Et propose une méthode « au cas par cas », distinguant les cas de « fusion », de « réinternalisation » de missions ou encore de « mutualisation ».

La commission a proposé la suppression de certains organismes, notamment l’Agence nationale de la cohésion des territoires, l’Agence bio ou encore l’Agence nationale du sport, mais sans abandonner les politiques publiques qu’elles mettent en œuvre, les sénateurs plaidant pour réinternaliser des missions au sein des ministères ou renforcer les services préfectoraux.

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Le Monde avec AFP

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