Greg Girard n’en revient toujours pas. En septembre 2024, le grand photographe canadien, qui fête cette année ses 70 ans, a vu avec stupéfaction des photos de ses débuts défiler sur un podium à la fashion week de Milan. Le duo de créateurs Lucie et Luke Meier avait choisi d’en faire des imprimés pour la collection printemps-été 2025 de Jil Sander. Le couple helvético-canadien souhaitait rendre hommage à « l’esthétique sombre et rétro » de ces images prises à Vancouver dans les années 1970 et au début des années 1980. Une esthétique qui, estiment-ils, « continue d’influencer la culture contemporaine » au Canada.
Tous les articles de notre Spécial Canada
A la veille du G7, qui se tiendra du 15 au 17 juin à Kananaskis, en Alberta, nous avons rencontré des Canadiens qui racontent un pays pluriel : des francophones ou des anglophones, vivant au bord de l’Atlantique, du Pacifique ou près des Grands Lacs, à quelques encablures des Etats-Unis. Des personnes inquiètes des menaces que le président Donald Trump fait peser sur leur territoire en voulant en faire le 51ᵉ Etat américain, mais qui se saisissent de cette occasion pour s’interroger sur leur identité singulière.
Surgissaient ainsi du passé la devanture d’un café sous la neige, des voitures égarées sur un parking désert, une chambre de motel, la vitrine d’une bijouterie… Des scènes empreintes de nostalgie, toutes nocturnes, éclairées au néon et qui ont fait l’objet d’un livre intitulé Under Vancouver : 1972-1982 (The Magenta Foundation, 2017).
« Ces photos témoignent d’une époque révolue. J’avais 17 ou 18 ans, j’habitais dans la lointaine banlieue où j’étais né, et j’avais simplement envie de découvrir le centre de la ville au hasard de rencontres fortuites, dans la rue, les bars, les hôtels, les quais du port », se remémore Greg Girard. Le pudique photographe s’empresse d’ajouter que, à l’instar de nombreux confrères, cette expérience lui a permis d’explorer un monde qui n’était pas le sien, à travers l’œil de son appareil photo. « Il y avait quelque chose d’excitant à parcourir des rues où, sans doute, je ne me serais autrement jamais aventuré. Il ne s’agissait pas de documenter Vancouver pour la postérité, mais simplement de capter des scènes pour mon plaisir personnel. »
Des airs de tableaux d’Edward Hopper
Il vous reste 59.69% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.