- Alors que des émeutes anti-immigrés secouent une ville espagnole depuis vendredi après l’agression d’un vieil homme, une vidéo partagée sur les réseaux sociaux prétend montrer l’incendie d’une mosquée à Barcelone.
- Si une mosquée a bien été dégradée dans une commune proche de la métropole catalane, ces images montrent en réalité un feu en Indonésie en 2022.
- C’est l’une des publications trompeuses qui se mêlent aux vraies images des heurts dans un contexte tendu.
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L’info passée au crible des Vérificateurs
Des émeutes anti-immigrés ont secoué l’Espagne après l’agression d’un vieil homme le 9 juillet à Torre Pacheco, une petite ville située dans le sud-est du pays. De nombreuses images de violence circulent en ligne. Dans ce contexte, cette vidéo (nouvelle fenêtre)du dôme d’un bâtiment dévoré par les flammes est très partagée sur les réseaux sociaux. On la retrouve sur X, en espagnol (nouvelle fenêtre), en français (nouvelle fenêtre) et en anglais (nouvelle fenêtre). « Barcelone – La mosquée Piera ravagée par le feu
« , peut-on lire en légende. Mais cette vidéo fait partie d’un ensemble de publications anciennes, sans lien avec les évènements récents, qui sont reprises afin d’amplifier les réactions en ligne. Les Vérificateurs démêlent le vrai du faux.
D’anciennes images
En tapant les mots clés « mosquée » et « Piera », nous retrouvons bien des informations sur un cas d’incendie récent. La presse espagnole évoque (nouvelle fenêtre) les dégâts causés par un incendie, volontaire (nouvelle fenêtre) selon les autorités, à la nouvelle mosquée de la commune de Piera (nouvelle fenêtre), située à 50 kilomètres de Barcelone, quelques jours avant son inauguration (nouvelle fenêtre). Il ne s’agit donc pas d’une mosquée nommée « Piera » dans la capitale catalane même. Mohamed Ajana El Ouafi, secrétaire de la Commission islamique d’Espagne, a dénoncé, dans une publication sur X, (nouvelle fenêtre) une « attaque xénophobe »
, déplorant « une menace sérieuse pour la coexistence pacifique, le respect mutuel et la cohésion sociale »
. Mais la photo publiée par les autorités (nouvelle fenêtre) qui montre un bâtiment de petite taille, de couleur ambre, sans grand dôme, avec des traces de cendres noires, ne correspond pas à la vidéo partagée sur les réseaux. Et pour cause, il s’agit en réalité d’anciennes images d’un autre incendie, reprises à des fins sensationnalistes.
En effectuant une recherche par image inversée, nous retrouvons la vidéo du dôme d’une mosquée en feu dans plusieurs médias, comme CNN (nouvelle fenêtre), India Today
(nouvelle fenêtre) ou encore The Jakarta Post
(nouvelle fenêtre). Sauf qu’elle date… du 20 octobre 2022. Elle montre l’incendie de la mosquée du Centre islamique de Jakarta, la capitale de l’Indonésie, qui a eu lieu alors que le bâtiment était en travaux de rénovation. Nous avons retrouvé les coordonnées géographiques du centre, sur Google Earth (nouvelle fenêtre). Le logiciel nous permet de voir les images satellites du lieu à plusieurs dates. Nous observons le dôme de la mosquée intact vu de l’espace le 27 septembre 2022. À la date du 22 septembre 2023, donc après l’incendie, le dôme est détruit et les dommages causés par le feu sont encore visibles. La vidéo partagée n’a donc rien à voir avec l’Espagne. Mais elle est visuellement très impressionnante et apte à susciter de l’engagement en ligne. C’est pourquoi elle a été reprise et associée à tort aux émeutes récentes.
Avant d’être partagée par des internautes français, cette vidéo a été publiée sur la page X de Tommy Robinson (nouvelle fenêtre). Par le passé, ce militant d’extrême droite et activiste anti-immigration britannique a déjà été impliqué dans la propagation de fausses informations en ligne pour attiser la violence. En 2024, comme l’expliquaient les Vérificateurs, Robinson a partagé des contenus pour alimenter les émeutes racistes qui ont secoué le Royaume-Uni après que trois fillettes ont été tuées dans une attaque au couteau.
Et il ne s’agit pas d’un cas isolé. Plusieurs nuits d’émeutes (nouvelle fenêtre) ciblant les immigrés ont fait plusieurs blessés à la suite de l’agression d’un retraité à Torre Pacheco, le 9 juillet. Une photo du visage de Domingo (nouvelle fenêtre), 68 ans, ensanglanté et tuméfié, a rapidement fait le tour des réseaux sociaux. Une vidéo (nouvelle fenêtre) supposée montrer l’agression est également devenue virale, accompagnée d’une légende désignant « un groupe de Maghrébins » comme
responsable de la violente attaque. Des expéditions punitives ont été organisées par plusieurs groupes de personnes cagoulées, armées de bâtons, à la recherche de personnes d’origine étrangère. Dix personnes ont été interpellées (nouvelle fenêtre)après ces émeutes racistes. Cette flopée de violences est accompagnée d’une vague d’anciennes images détournées et partagées en masse.
Selon la télévision espagnole RTVE (nouvelle fenêtre), la vidéo supposée de l’agression du retraité est fausse. Les gendarmes et les autorités locales ont assuré à la chaîne que ces images ne montraient pas l’agression en question. La victime de cette attaque a confirmé dans une interview (nouvelle fenêtre)que ce n’était pas lui sur les images. Il s’agit en réalité d’une autre agression survenue en mai à Almería, comme l’explique elle-même la véritable victime dans une vidéo.
Le média de fact-checking espagnol Maldita (nouvelle fenêtre) a recensé une dizaine de fausses publications : faux communiqués de presse, fausse liste de présumés agresseurs, vieilles vidéos d’attaques en Espagne ou au Mexique… La vidéo (nouvelle fenêtre) d’une opération policière à Torrevieja, faussement associée aux évènements à Torre Pacheco, s’est même retrouvée à la télévision portugaise (nouvelle fenêtre). Ces images sont donc faussement associées aux heurts en Espagne pour attiser la haine. Sur les réseaux sociaux, plusieurs groupes lancent des appels à la « chasse » aux immigrés du 15 au 17 juillet.
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