Dans une vidéo consultée un million de fois en quelques semaines, une coach sportive et influenceuse vante les mérites du clou de girofle.
Cette épice permettrait entre autres de réguler la glycémie, de lutter contre l’arthrite ou d’aider notre corps à combattre les virus.
TF1info a fait appel à l’Inserm pour en savoir plus. Verdict : il s’agit d’affirmations en grande majorité trompeuses, ne s’appuyant pas sur des essais cliniques.

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L’info passée au crible des Vérificateurs

Recettes pour « nettoyer son foie », aliments pour « rester en bonne santé après 50 ans »… Sur son compte Instagram, une coach sportive multiplie les courtes vidéos, partagées aux 20.000 abonnés qui la suivent. L’une des plus récentes a connu un succès significatif : elle s’intéresse (nouvelle fenêtre) à une épice que nous sommes nombreux à avoir dans nos cuisines, le clou de girofle. Ce dernier présenterait de multiples vertus : en plus d’être un « analgésique incroyable naturel contre les douleurs dentaires », il réduirait les inflammations, « y compris l’arthrite et les douleurs articulaires ». En mâcher un par jour durant une semaine serait également indiqué pour « combattre les virus » ou « réguler la glycémie ».

Des « conclusions hâtives » à partir de résultats in vitro

Le clou de girofle mérite-t-il de telles louanges ? Pour le savoir, TF1info a sollicité le Pr Francis Berenbaum. Chef du service de rhumatologie de l’hôpital Saint-Antoine et chercheur à l’Inserm, il n’est pas surpris de voir une telle vidéo aussi largement repartagée. À une époque, « nous avons connu ça aussi avec le chou pour les rhumatismes, ou bien encore avec le brocoli ! »

Après avoir épluché la littérature scientifique, le spécialiste explique qu’à « l’exception d’une application locale pour soulager les douleurs dentaires, on ne trouve que très peu de résultats. En conséquence, « tout ce qui va au-delà de ça n’est que pure spéculation », ajoute-t-il. Si quelques bienfaits sont évoqués, que ce soit pour renforcer l’immunité ou combattre les douleurs articulaires, ce sont uniquement « des propriétés mises en avant in vitro« , lors de tests sur des tissus ou des cellules.

Le chercheur insiste sur ce point, puisqu’il ne faut selon lui « absolument pas tirer des conclusions hâtives de résultats obtenus in vitro ». Dans « l’immense majorité des cas », les effets positifs qui sont observés de cette manière ne sont pas retrouvés lorsque sont conduits des essais cliniques sur des patients. C’est d’ailleurs « pour cela que le développement d’un médicament coûte si cher », glisse Francis Berenbaum.

Réguler la glycémie ? « C’est n’importe quoi »

Avec le clou de girofle comme pour n’importe quelle molécule de médicament, il est important de s’intéresser à la balance bénéfice-risque. L’expert de l’Inserm s’est intéressé à la question et pu observer grâce à quelques calculs qu’il serait nécessaire de mâcher « plusieurs dizaines de clous de girofle par jour » pour se trouver face à une vraie toxicité. « Ce qui est plus dangereux, c’est l’huile essentielle », tranche Francis Berenbaum. Elle est en effet « beaucoup plus concentrée en eugénol », cette molécule présente en quantité dans les clous de girofle.

« Là, si vous commencez à être en excès, il faut faire attention. En particulier à cause des risques d’irritation du tube digestif et des toxicités hépatiques. » Pour préserver son foie, mieux vaut donc y avoir recours avec parcimonie. Si les preuves dans la littérature scientifique nous manquent, le chercheur mentionne aussi un « risque potentiel pour les gens sous anticoagulant », là encore en cas d’utilisation excessive.

Si dans la plupart des cas, il faut avant tout s’attendre à ce que le clou de girofle n’ait pas d’effet, Francis Berenbaum hausse le ton quand on évoque la prétendue capacité de l’épice à « réguler la glycémie ». Prétendre cela, « c’est n’importe quoi », tranche-t-il, « ça demande des preuves formelles ». Lorsque l’on évoque la glycémie, « on parle d’AVC, d’infarctus… D’affections qui tuent, qui génèrent des handicaps. C’est dangereux de dire des choses pareilles. »

En résumé, le rhumatologue conseille surtout le clou de girofle… En cuisine, où son « bon goût » vient agrémenter de multiples plats. Il appelle aussi à ne pas faire l’erreur de penser que « parce qu’un produit vient de la nature, il est forcément meilleur et sans risque pour notre santé ». En résumé, « il vaut mieux un médicament qui a subi des évaluations rigoureuses, que des produits dits ‘naturels’, sans preuves formelles de leur efficacité ».

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Thomas DESZPOT

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