Moscou refuse régulièrement le déploiement de troupes européennes pour garantir la paix en Ukraine.
Face à cette impasse, le RN et LFI plaident pour l’envoi des Casques bleus des Nations Unies.
Une mesure qui n’a rien de si simple.

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L’info passée au crible des Vérificateurs

Malgré plusieurs semaines de discussions et une crise diplomatique, les contours d’un cessez-le-feu en Ukraine demeurent toujours aussi incertains. Parmi les principaux points de crispation, se trouve celui sur la meilleure manière de garantir la pérennité d’une éventuelle trêve, voire d’une paix durable, alors que Moscou n’a jamais respecté les accords de Minsk (nouvelle fenêtre)signés il y a plus de dix ans. Tandis que les Européens, qui vont se réunir le 27 mars prochain à Paris, envisagent de mobiliser leur troupe en Ukraine, la diplomatie russe écarte cette éventualité. « Cela signifierait l’implication de ces pays dans un conflit armé direct avec notre pays, auquel nous répondrons par tous les moyens disponibles », a rétorqué Maria Zakharova le 13 mars.

Face à cette impasse, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen proposent la même solution : le recours aux forces de maintien de la paix des Nations unies. « Le gouvernement parle de guerre pendant qu’une discussion est en cours sur la paix », a ironisé l’Insoumis le 13 mars, proposant que « toutes les centrales nucléaires ukrainiennes soient entourées de Casques bleus ». « Nous ne pourrons jamais soutenir une chimérique défense européenne », avait quant à elle lancé la cheffe des députés d’extrême droite devant l’Assemblée nationale (nouvelle fenêtre), estimant que « seule une éventuelle participation à une opération sous mandat Casques bleus pourrait être envisageable ». 

La veto dispose d’un droit de veto… contournable

Une proposition accueillie avec beaucoup de scepticisme par certains internautes, rappelant que celle-ci serait soumise « au droit de veto de la Russie ». Et de fait, comme l’indique le site de l’organisation (nouvelle fenêtre), c’est bien le Conseil de sécurité de l’ONU qui décide du déploiement d’une mission de maintien de la paix. Un organe onusien composé de quinze membres, dont cinq permanents qui possèdent un droit de veto. Dans la liste, figure la Russie, au même titre que les États-Unis ou la France. 

Reste que ce veto « peut être contourné », note Franck Petiteville. Professeur de science politique à l’Institut d’études politiques de Grenoble, il rappelle que dans certains cas, l’Assemblée générale, qui réunit la totalité des pays membres, « peut se substituer au Conseil de sécurité lorsque ce dernier est paralysé par un veto et incapable de garantir ses missions de maintien de la sécurité ». C’est la résolution 377 (nouvelle fenêtre), dite résolution Dean Acheston. À titre d’exemple, c’est ainsi qu’en 1956, l’Assemblée générale des Nations Unies décide de l’envoi de Casques bleus sur le canal de Suez, outrepassant le veto de la France et du Royaume-Uni. 

Cela signifie-t-il qu’envoyer les Casques bleus en Ukraine est une option réalisable ? « Probablement pas », nous répond Franck Petiteville. À cause de la nature même de ces troupes. Auprès de TF1info, ce spécialiste des organisations internationales rappelle en effet que la mission première de ces forces est le maintien de la sécurité d’une zone. « La condition préalable à tout déploiement, c’est donc un cessez-le-feu stabilisé ». (nouvelle fenêtre)

Une condition d’autant plus importante que le cas de la Bosnie-Herzégovine hante encore dans tous les esprits. Confrontées à un déluge de violence, les forces de l’ONU mobilisées dans les « zones de sécurité » instaurées par le Conseil de sécurité en 1992 sont « humiliées, arrêtées ». Au total, 167 membres dont 52 Français sont tués pendant ses opérations. C’est pourquoi désormais, « on ne déploie plus de Casques bleus dans les zones de guerre où il n’y a en réalité aucune paix à maintenir », relève notre interlocuteur. Ce qui est loin d’être le cas en Ukraine. L’invasion violente de la Russie (nouvelle fenêtre) et les positions du Kremlin démontrent au contraire que la région correspond encore à « un contexte d’hostilité armée intense ». « Je ne vois pas comment on pourrait employer dans cette zone des soldats dont la doctrine d’emploi des armes est défensive, sauf à en faire de la chaire à canon. » 

En résumé, cette proposition de Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon d’envoyer des Casques bleus en Ukraine est peu envisageable. Au-delà de la seule question juridique d’un veto qui pourrait être, ou non, contourné, « il y a une question de doctrine du maintien de la paix qui est impropre à la situation », conclut Franck Petiteville. 

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Felicia SIDERIS

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