Sur le continent américain, William Osler (1849-1919) passe pour un des pères de la médecine moderne. Cofondateur du célèbre hôpital Johns-Hopkins, à Baltimore (Etats-Unis), il a révolutionné la formation des médecins en l’installant au sein même de l’hôpital. Outre-Atlantique, ses citations font figure de maximes. L’une des plus célèbres fut prononcée en 1904, à la faculté de médecine de l’université McGill, de Montréal : « Le désir de prendre des médicaments est peut-être ce qui distingue le mieux l’homme de l’animal. »

Dans le livre Nos plus grands médecins (Les Liens qui libèrent), dont la traduction française sort le 8 octobre, le biologiste Jaap de Roode, professeur à l’université Emory d’Atlanta (Géorgie), reprend la formule du praticien canadien. Mais pour lui donner tort. Les plus grands médecins qu’il a choisi de nous présenter n’ont ni blouse ni stéthoscope. Le sous-titre le dit d’emblée : « Comment les fourmis, les papillons, les éléphants… se soignent depuis des millions d’années. » Après l’examen de quarante ans de littérature scientifique et dix ans d’expériences conduites dans son propre laboratoire, il peut l’affirmer. Le fameux « propre de l’homme »déjà malmené par l’exploration des capacités d’apprentissage, de langage, d’empathie, de conceptualisation ou encore d’organisation sociale des animaux – ne réside pas non plus dans l’aptitude au soin.

Comme souvent, tout a commencé par nos plus proches cousins. En 1977, l’anthropologue Richard Wrangham, de Harvard, constate un drôle de comportement chez les chimpanzés de Gombe, en Tanzanie. Plutôt que les fruits dont ils raffolent, il leur arrive de consommer des feuilles d’Aspilia mossambicensis. Ou plutôt de les avaler. Intrigué, le chercheur scrute leurs excréments. Il y retrouve les feuilles rugueuses et velues de l’herbacée. Et, piégés entre les poils, des vers. En poursuivant ses observations, il constate que le procédé n’est pas collectif, mais bien individuel : seuls les primates infectés se purgent.

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