« La Renarde et le Lièvre » (1973), de Youri Norstein.

L’AVIS DU « MONDE » – À NE PAS MANQUER

Quarante-trois minutes de poésie et d’aventures, c’est à prendre et à ne pas laisser. Le distributeur Malavida ressort deux joyaux de l’animation russe à destination du jeune public, La Renarde et le Lièvre (1973), de Youri Norstein, né en 1941, et L’Antilope d’or (1954), de Lev Atamanov (1905-1981). Ces deux auteurs sont issus des studios moscovites Soyuzmultfilm, créés en 1936, lesquels, pendant la guerre froide, rivaliseront d’inventivité avec Walt Disney – au moment où sortait L’Antilope d’or, le studio américain délivrait Peter Pan (1953), La Belle et le Clochard (1955) ou encore La Belle au bois dormant (1959).

Youri Norstein, qui rêvait d’être peintre, s’est distingué dans l’animation en fabriquant des fables aux écrins enchanteurs : ses motifs floraux et ses superpositions de papier découpé créent de la profondeur et du relief, ainsi qu’une atmosphère d’une infinie douceur, laquelle se lit jusque dans le regard des personnages. Ici le Lièvre : cet animal aux longues oreilles, tout gentil, vit d’un bonheur simple dans sa cabane en rondins de bois, jouant de la balalaïka pendant que le feu illumine le poêle. A quelques pas de là, la Renarde se pavane dans un palais de glace scintillant, narguant sur ses jolis patins la maisonnette du Lièvre. Mais, le printemps venu, son palais fond jusqu’à la dernière goutte. Aussitôt, la Renarde prend possession de la cabane du Lièvre et jette celui-ci dehors. Le Loup, le Grand Ours, le Taureau, etc., ont beau vanter chacun leur force, aucun n’aura le courage de déloger l’intruse.

Lion d’or à la Mostra de Venise

L’histoire crée un comique de répétition et fera triompher un petit animal, le Coq, qui ainsi rétablira l’harmonie. On admire le rouge des plumes, le rideau soyeux qui sert de paravent au Lièvre, le graphisme de la forêt esquissé par des lignes, enfin l’esthétique naïve des personnages, aux corps articulés, qui finissent parfois par se fondre dans les motifs de tapisserie.

Tout autre est L’Antilope d’or, aux couleurs vives, aux mouvements fluides et aux papillons merveilleux. Son réalisateur, Lev Atamanov, rejoignit les studios Soyuzmultfilm en 1948, enchaînant les courts et longs-métrages. La Reine des neiges (1957), son film d’animation inspiré du conte d’Andersen, lui valut une reconnaissance internationale ainsi que le Lion d’or à la Mostra de Venise – Hayao Miyasaki le cite régulièrement comme l’une de ses influences majeures.

L’Antilope d’or est fabriqué selon la technique de la rotoscopie, laquelle permet de retranscrire par le dessin des images en prises de vues réelles – Disney y eut recours, par exemple pour Blanche-Neige (1937). Ce procédé confère une grande souplesse aux mouvements des personnages, comme en témoignent ici la grâce de l’antilope et celle du petit garçon, autre héros du film. Ce jeune orphelin vit au milieu des singes, toujours prompts à faire pleuvoir des noix de coco sur les méchants, comme un clin d’œil à Mowgli dans Le livre de la jungle (1894), l’ouvrage de Rudyard Kipling (1894) que Disney adaptera en 1967.

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