Des paroles cinglantes et une préoccupation bien visible. Ces derniers jours, Luiz Inacio Lula da Silva n’a pas cherché à masquer son inquiétude au sujet d’une possible victoire de Donald Trump. Sans le nommer, le président du Brésil a qualifié, vendredi 1er novembre, la « haine » et les « mensonges » distillés par le milliardaire et ses alliés de « fascisme et [de] nazisme revenant avec un autre visage », dans une interview diffusée sur TF1.
La victoire du candidat républicain, qui a remporté, mardi 5 novembre, l’élection présidentielle américaine, sonne comme un coup dur et une lourde menace pour le dirigeant de gauche, tant sur le plan diplomatique que sur la scène intérieure. « La victoire de Trump est un défi gigantesque, sans doute le moment le plus délicat pour le Brésil depuis décennies », analyse Jamil Chade, journaliste brésilien au site d’information UOL et spécialiste en relations internationales.
Le milliardaire ne fait pas mystère de son mépris pour son homologue brésilien, qu’il a, par le passé, traité de « Lulu le dingue ». Tout l’inverse de l’ancien président Jair Bolsonaro (2019-2023), réplique et vassal de Donald Trump, qui avait systématiquement aligné sa diplomatie sur celle de son « ami » américain. En 2020, il avait attendu six longues semaines avant de reconnaître la victoire de Joe Biden à la présidentielle.
Entre-temps, Lula a affiché sa proximité avec le démocrate. Les deux dirigeants ont signé, en 2023, un accord sur la protection des droits des travailleurs – capital pour l’ancien syndicaliste brésilien –, tandis que Washington annonçait dans la foulée son entrée dans le Fonds Amazonie, avec un apport de 500 millions de dollars (environ 460 millions d’euros). Cette même année, les exportations brésiliennes battaient des records, avec près de 30 milliards de dollars de produits industriels vendus aux Etats-Unis.
Retour du protectionnisme
Le succès électoral de Donald Trump promet de remettre en cause cette petite « lune de miel ». « Lula est un pragmatique. Il ne veut pas être celui qui lancera les hostilités. Mais si la Maison Blanche devient le centre névralgique de l’extrême droite latino-américaine, on pourrait effectivement assister à une redéfinition profonde de la relation avec Washington et une réorientation géopolitique majeure du Brésil », estime Jamil Chade.
Au vu des affinités entre le milliardaire et l’extrême droite latino-américaine, le risque paraît réel. Le « Project 2025 », feuille de route élaborée par des proches de Donald Trump, évoque ouvertement la possibilité d’utiliser les agences publiques américaines à l’étranger, telle la riche USAID (Agence des Etats-Unis pour le développement international), afin de combattre les « idées socialistes » et les régimes « hostiles aux intérêts américains et aux entreprises » sur le continent. Parmi eux se trouvent le Venezuela de Nicolas Maduro, mais aussi le Mexique et le Chili, gouvernés par la gauche démocratique.
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