Dimanche 17 novembre, l’église de Santa Cruz à Buenos Aires a résonné d’un « presente ! » (« présent ! ») collectif, le cri de ralliement des familles de victimes de la dictature argentine (1976-1983) et des organisations de défense des droits humains, signifiant que la mémoire de leur proche reste vivante. Le président français, Emmanuel Macron, en visite d’Etat à Buenos Aires, a rendu hommage aux victimes de la junte – 30 000 morts et disparus selon les organisations de leurs proches – et notamment aux victimes françaises – une vingtaine – dans cette église également lieu de mémoire. Un symbole fort, alors que le gouvernement ultralibéral de Javier Milei, arrivé au pouvoir en décembre 2023, démantèle les politiques de mémoire, de vérité et de justice.
« On ne vous oublie pas », a assuré le président français aux familles de victimes. Emmanuel Macron s’est rendu à Buenos Aires samedi 16 et dimanche 17 novembre, où il a rencontré son homologue Javier Milei à deux reprises. Il s’agissait de la première étape de sa tournée sud-américaine avant le sommet du G20, les 18 et 19 novembre à Rio, au Brésil, qui sera suivie d’un déplacement au Chili.
Accompagné de son épouse Brigitte Macron, il a dialogué pendant plus d’une demi-heure avec des familles de victimes dans ce lieu de culte où se retrouvaient pendant la dictature des proches de disparus. Dans la clandestinité, ils tentaient d’organiser leurs recherches, notamment autour des Mères de la place de Mai.
« La solidarité du peuple français »
Entre le 8 et le 10 décembre 1977, le « groupe de Santa Cruz » a été, à son tour, séquestré par les forces armées. Douze personnes au total, qui ont ensuite été emprisonnées, torturées et jetées vivantes dans les eaux bordant Buenos Aires et sa région. Parmi elles, deux religieuses françaises, Alice Domon et Léonie Duquet, mais aussi la fondatrice des Mères de la place de Mai, Azucena Villaflor. Certains corps ont été identifiés en 2005, dont celui de Léonie Duquet, inhumé à l’église de Santa Cruz.
« Nous avons remercié Emmanuel Macron pour son geste. Avec l’attaque actuelle contre les politiques de mémoire, il est très important qu’un chef d’Etat rende hommage aux victimes ; tous les gestes en défense des droits humains sont importants », a estimé Ana Maria Careaga, elle-même enlevée et détenue pendant la dictature. Sa mère, Esther Ballestrino, fait partie des victimes du « groupe de Santa Cruz ». Visiblement émue, Florencia Battiti, directrice du Parc de la mémoire à Buenos Aires, a également salué un geste « très important » d’Emmanuel Macron, soulignant à quel point le soutien de la communauté internationale est attendu en Argentine. « Ici, dans nos luttes, nous avons beaucoup reçu la solidarité du peuple français », a retracé Adolfo Perez Esquivel, Prix Nobel de la paix (1980), lui aussi arrêté et torturé. La France a reçu des milliers d’exilés argentins et sud-américains pendant les dictatures militaires des années 1970 à 1990.
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