En lingerie noire et moulante, Sabrina Carpenter musarde dans la salle de bains aménagée sur la scène du Chase Center, à San Francisco, en Californie. Sous un miroir en forme de cœur, sans ôter son justaucorps en dentelle, la chanteuse s’assoit sur la cuvette des toilettes et entonne la bluette Sharpest Tool. Ce tableau aurait-il fait des émules, parmi les 18 000 personnes venues l’écouter ce soir-là ? Aux prémices du spectacle, une fan a retiré sa culotte et uriné par terre – de peur, suppose-t-on, de perdre sa place à proximité de la scène. On a connu meilleure manière de marquer son territoire : sitôt alertée, la sécurité évacue la fautive, devant la foule stupéfaite.
Peu après, un certain Kyle est la cible d’un autre type d’intervention, et la proie d’un autre genre de débordement. « Vous êtes en état d’arrestation pour excès de beaugossitude ! », l’apostrophe la pop star, tandis que l’écran géant montre le visage poupin du jeune homme. Et Sabrina Carpenter de lui tendre, avec tendresse, des menottes rose bonbon, avant de reprendre son tour de chant sous les vivats. Quant à Kyle, il peine d’autant plus à contenir son émoi qu’il est l’un des rares spectateurs masculins : autour de lui, la plupart des chevelures sont ornées de rubans blancs, le signe distinctif des « Carpenters », ainsi qu’on surnomme les fans de la diva.
En ce 9 novembre, on pouvait craindre que l’humeur ne soit guère à la fête, après la défaite, quatre jours plus tôt, de Kamala Harris à la présidentielle américaine. La démocrate n’a-t-elle pas enregistré ses meilleurs scores chez celles que Carpenter séduit en premier lieu, les jeunes urbaines ? Et n’a-t-elle pas commencé sa carrière politique ici même, dans la baie de San Francisco ? Si la chanteuse n’a pas explicitement apporté son soutien à la candidate, elle a incité plus de 35 000 personnes à s’inscrire sur les listes électorales à travers la plateforme HeadCount, dont elle a pulvérisé les records.
A en juger par sa mine joueuse et enjouée, l’Américaine semble s’être focalisée sur une autre nouvelle, tombée la veille du concert : avec six nominations dans les catégories reines des Grammy Awards, qui voient, chaque hiver, l’industrie musicale récompenser ses champions, elle n’est devancée que par Beyoncé, intouchable sur ce terrain. Et fait jeu égal avec Chappell Roan, Charli XCX et Taylor Swift, les trois chanteuses aux côtés desquelles elle squatte les cimes des hit-parades internationaux depuis le printemps.
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