C’est une situation inédite pour un groupe de cette taille, qui plus est détenu en partie par l’Etat. Pour la deuxième fois de l’année, des élections professionnelles risquent d’échouer chez Orange. Alors que 133 000 salariés et anciens salariés de l’opérateur télécoms étaient appelés à élire, du mardi 19 au jeudi 21 novembre, leurs douze représentants au conseil de surveillance d’Orange Actions, le fonds commun de placement d’entreprise qui détient 7,5 % du capital (12,10 % des droits de vote), la direction s’inquiète de possibles irrégularités.
« La commission de contrôle des opérations de vote (…) a constaté un certain nombre de violations du règlement électoral, essentiellement de la part de la CFE-CGC Orange », indique la direction dans un message aux salariés publié le vendredi 22 novembre, au lendemain de l’annonce des résultats. Le premier syndicat de l’opérateur est suspecté d’avoir démarché des salariés tout au long du scrutin, y compris sur leur mail ou numéro personnel. Le message évoque aussi « des attaques personnelles et des propos mensongers ».
Ces incidents interviennent alors que le tribunal de commerce de Nanterre, saisi par la CFDT, deuxième syndicat du groupe, avait annulé, le 4 mai, l’élection organisée en février pour choisir le représentant des salariés actionnaires au conseil d’administration. Depuis, ce poste est vacant. Le juge sanctionnait déjà « une rupture du principe de l’égalité des armes par utilisation massive, par une organisation syndicale (la CFE-CGC), de moyens extraordinaires en faveur d’un candidat ».
« Nous avions signé un nouveau protocole électoral pour éviter que ces pratiques se renouvellent, mais cela a continué. Nous réfléchissons à saisir de nouveau la justice », souligne Olivier Berducou, délégué syndical central de la CFDT Orange. En cas d’annulation, le fonds des salariés actionnaires, deuxième actionnaire après l’Etat (23 %), risque de ne pas pouvoir voter lors de la prochaine assemblée générale, au printemps 2025.
« Une ambiance exécrable »
N’excluant pas de porter plainte pour diffamation, Sébastien Crozier, le président de la CFE-CGC d’Orange, révèle avoir lui-même assigné le groupe, avant la tenue du scrutin, « pour contester le nouveau protocole électoral, réécrit par la direction, main dans la main avec la CFDT ».
Courantes dans l’univers syndical, ces batailles resteraient anecdotiques si elles n’avaient pas d’incidence sur la gouvernance d’Orange et si elles ne démontraient pas une dégradation du climat social. M. Crozier reconnaît lui-même « une ambiance exécrable ». Ses relations avec la direction, dont il ne cesse de demander le départ, sont notoirement difficiles. Surtout avec le président Jacques Aschenbroich, nommé à ces fonctions, en mai 2022, alors que lui-même visait le poste.
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