« Je baisse, j’éteins, je décale. » Nous étions le 17 octobre 2022 et le gouvernement de l’époque lançait fièrement sa grande campagne de sobriété énergétique, supposée répondre à la grande crise énergétique de 2022 et rééditée à l’automne 2023. Souvenez-vous : des prix au plafond, une sécheresse qui paralyse les barrages, des centrales nucléaires stoppées pour cause de corrosion… Avec, à la clé, des faillites d’entreprises, des ménages grelottant pour économiser le chauffage et un bouclier énergétique qui a plombé la dette française.
Eh bien tout cela, c’est fini. Consommez, consommez, a exhorté, mardi 10 décembre, le PDG d’EDF, à la tribune du colloque de l’Union française de l’électricité. Luc Rémont constate aujourd’hui que la capacité de production de l’entreprise s’envole alors que la consommation décline. Les barrages sont pleins, les centrales tournent à fond. L’électricien a encore revu à la hausse, mardi, ses prévisions de production nucléaire. Dans son bilan du premier semestre 2024, RTE, le gestionnaire du réseau français, parle d’une production « exceptionnelle » en hausse de 37 % pour l’hydraulique et de 12 % pour le nucléaire, face à une consommation qui n’en finit pas de décliner : jusqu’à 10 % de moins qu’avant la crise.
Répit pour l’Etat
La bonne nouvelle est que les prix de l’électricité sont revenus à leurs niveaux d’avant 2022, avec une multiplication des épisodes de prix négatifs. De plus, la sécurité de l’alimentation à l’approche de l’hiver est garantie. La moins bonne nouvelle est que cette chute traduit à la fois le marasme économique actuel et, surtout, une bascule plus faible que prévu des usages, industriels et particuliers, vers l’électrique. La voiture à batterie patine et, avec elle, les espoirs de réduire encore la facture carbone des Français.
L’autre conséquence de cette situation inédite est qu’EDF n’est plus si pressé que cela d’engager le chantier de construction de ses six nouveaux réacteurs nucléaires, dont la facture devrait très allègrement dépasser les 60 milliards d’euros, soit bien plus qu’envisagé. Un répit qui arrange aussi son actionnaire, l’Etat, que ses poches vides et le désastre politique actuel n’encouragent pas à l’ambition énergétique. Changement d’époque.