Un ex-ministre de la défense du président d’extrême droite Jair Bolsonaro, soupçonné d’avoir « dirigé » un projet présumé de coup d’Etat et d’avoir tenté de faire entrave à l’enquête, a été arrêté, samedi 14 décembre, au Brésil.
Ministre en 2021-2022, le général Walter Braga Netto fut le colistier de M. Bolsonaro à l’élection présidentielle d’octobre 2022, perdue face à l’actuel chef de l’Etat, Luiz Inacio Lula da Silva, de gauche.
L’arrestation a été ordonnée par le juge Alexandre de Moraes, du Tribunal suprême fédéral (TSF), en raison de la « participation très grave » du général au projet de coup d’Etat, « dans un véritable rôle de direction, organisation et financement, en plus d’indices pertinents indiquant qu’il a agi de manière répétée pour faire obstacle à l’enquête ».
Le général Walter « Braga Netto a été arrêté », a confirmé à l’Agence France-Presse une source policière.
« Participation active »
A la fin de novembre, la police fédérale (PF) avait recommandé d’inculper M. Bolsonaro, 69 ans, et plusieurs de ses proches, pour leur implication présumée dans ce projet de coup d’Etat visant à empêcher l’investiture de Lula, dont le général Braga Netto. Selon les éléments de l’enquête, M. Braga Netto a eu une « participation active » dans la tentative de faire pression sur des commandants des forces armées brésiliennes pour qu’ils rejoignent « le projet de coup d’Etat ».
Le général serait aussi impliqué dans l’obtention et la remise de fonds pour des opérations de surveillance, et pour « la planification d’enlèvements et, possiblement, d’homicides de personnes dépositaires de l’autorité publique ».
Il aurait aussi agi pour avoir des informations protégées par le secret judiciaire sur le déroulement de l’enquête et aurait fait pression pour que « la participation des personnes faisant l’objet d’une enquête ne soit pas entièrement divulguée ». Sa défense a assuré être en mesure de « prouver qu’il n’y a pas eu d’obstruction à l’enquête ».
Le général avait déjà été l’objet d’une opération policière en février dans le cadre de l’enquête sur « l’organisation criminelle qui a agi dans la tentative de coup d’Etat », mais n’avait pas alors été incarcéré.
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La police estime que M. Bolsonaro et 36 de ses proches devraient être poursuivis pour « les crimes d’abolition violente de l’Etat de droit, de coup d’Etat et d’organisation criminelle ». Elle a rassemblé des preuves pendant deux ans et rédigé un rapport de 884 pages, désormais entre les mains du procureur de la République, Paulo Gonet, qui doit décider s’il donne suite aux demandes d’inculpation. Selon les enquêteurs, M. Bolsonaro avait « pleinement conscience » des « actes clandestins visant à abolir l’Etat de droit » et y avait « participé activement ». Il avait en outre « pleinement conscience » d’une opération visant à assassiner Lula.
« Poignard vert et jaune »
Outre le leader de gauche, d’autres personnes étaient visées par des projets d’assassinat, notamment Geraldo Alckmin, alors vice-président élu, et le juge Moraes.
Appelé « Poignard vert et jaune », le projet de tuer Lula aurait été discuté dans la maison même du général Braga Netto. Et le plan a été imprimé au Planalto, le palais présidentiel, selon les enquêteurs.
Parmi les preuves réunies par la PF figure aussi un manuscrit saisi au siège du Parti libéral (PL) de M. Bolsonaro, dans les affaires d’un conseiller de M. Braga Netto. Sous le nom de code « Opération 142 », le document mentionne des options comme « interruption du processus de transition », « annulation des élections » et « prorogation des mandats ».
Lula l’avait emporté d’une courte avance au second tour de la présidentielle, à la fin d’octobre 2022, et avait entamé son troisième mandat le 1ᵉʳ janvier 2023. Il avait déjà été président de 2003 à 2010.
Le coup d’Etat n’a pas eu lieu, mais le 8 janvier 2023, quelques jours après l’investiture de Lula, des milliers de partisans de Jair Bolsonaro avaient envahi et vandalisé à Brasilia les bâtiments abritant la présidence, le TSF et le Parlement.
M. Bolsonaro, qui était parti quelques jours avant aux Etats-Unis, fait l’objet d’une autre enquête qui doit déterminer s’il était à l’origine de ces émeutes.