Un battement sourd et lancinant monte des sous-sols du Théâtre de la Ville, à Paris. Il semble provenir d’une porte cernée de turquoise fluo que l’on rêve de franchir. De quel outre-monde, dont l’écho s’insinue dans la salle, est-elle l’accès ? Est-ce le cardio d’un univers parallèle qui se fraie un chemin ? Le bruit souterrain d’une ville qui ne s’arrête jamais ? D’une fête lointaine dont persistent les effluves électriques étouffés ?
Cette pulsation profonde est le tremplin du spectacle Dub, créé pour 11 interprètes par le chorégraphe hip-hop Amala Dianor. Mercredi 11 décembre, cet opus claquant de puissance et d’élan communautaire s’est ouvert par un solo de l’expert en traditions indiennes Sangram Mukhopadhyay, dont la définition du geste éclate de rigueur sensuelle. Il sera bientôt transpercé par les beats implacables du musicien et DJ Awir Leon aux manettes de son synthétiseur et de sa boîte à rythmes. Pas le temps de retrouver son souffle, décollage immédiat vers un climax de plaisir à danser.
Quelle euphorie ! Quelle ivresse du geste et de la virtuosité ! Dub donne un coup de fouet aux hommages aux danses urbaines tel qu’on en voit régulièrement. Il convoque différents styles dans un dialogue organique et joyeux, tel un feu qui se répand dans l’espace. L’électro française aux mille bras volatiles flirte avec le waacking américain, les tricots de jambes du pantsula sud-africain s’enragent davantage auprès du Krump, le break lève un vent acrobatique sur le contemporain… Sans fin, sans cesse, et à toute allure, des transferts d’énergie s’opèrent d’un revers de bassin ou d’épaule, des échanges de savoir-faire circulent tandis que les flux et les rythmes se relancent comme des balles.
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