La justice sud-coréenne a approuvé dans la soirée du samedi 18 janvier (dimanche 19 janvier au petit matin, heure locale) la prolongation de la détention du président Yoon Suk Yeol, suspendu de ses fonctions après son arrestation pour avoir en vain tenté d’imposer la loi martiale, suscitant la colère de ses partisans, dont plusieurs ont pénétré dans le tribunal. Ces derniers ont brisé des vitres de fenêtres du bâtiment, situé dans l’ouest de Séoul, avant de s’y engouffrer, selon une vidéo diffusée en direct.
« Il y a une inquiétude quant au fait que le suspect puisse détruire des preuves », a argumenté le tribunal de Séoul devant lequel il comparaissait.
Des dizaines de milliers – 44 000 selon la police – de manifestants qui scandaient des slogans de soutien à M. Yoon et dont certains brandissaient des pancartes sur lesquelles était écrit « libérez le président » s’étaient auparavant rassemblés devant le tribunal et s’étaient affrontés à la police.
Quarante manifestants ont au total ont été interpellés à la suite de violences, notamment commises contre des membres de forces de l’ordre, a annoncé à l’Agence France-Presse(AFP) un responsable de la police locale.
Cinq heures d’audience
M. Yoon, qui a plongé la Corée du Sud dans sa pire crise politique depuis des décennies, s’est exprimé pendant 40 minutes devant les juges, a rapporté l’agence de presse Yonhap. Son avocat avait dit à l’AFP qu’il espérait y « rétablir son honneur ».
Il « a donné des explications et répondu fidèlement sur les faits, les preuves et les questions juridiques », a raconté Me Yoon Kab-keun aux journalistes après l’audience, qui s’est terminée au bout d’environ cinq heures.
M. Yoon a alors quitté le bâtiment dans une camionnette bleue du ministère de la justice, en direction du centre de détention de Séoul, où il est enfermé.
Le Bureau d’enquête sur la corruption (CIO), qui mène les investigations, a raconté dans un communiqué que deux véhicules transportant des membres de son équipe avaient été attaqués par des protestataires, « créant une situation dangereuse ». Le CIO va « réclamer que la police [impose] des sanctions strictes sur la base des preuves recueillies concernant ces actions ».
« Patriotisme passionné »
M. Yoon avait envoyé vendredi une lettre via ses avocats pour remercier ses partisans, parmi lesquels des chrétiens évangéliques et des YouTubeurs de droite, pour leurs manifestations, rendant hommage à leur « patriotisme passionné ». Samedi, les protestataires, qui agitaient des drapeaux sud-coréens et américains, ont occupé les principaux axes devant le tribunal.
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Le parti de M. Yoon est généralement favorable à l’alliance de sécurité américaine avec la Corée du Sud, et rejette tout engagement avec la Corée du Nord, dotée de l’arme nucléaire.
La décision du tribunal de maintenir en détention le chef de l’Etat donne aux procureurs le temps d’officialiser un acte d’accusation pour insurrection, ce qui le rendrait passible de la prison à vie ou d’exécution s’il est reconnu coupable. Une telle accusation signifierait que M. Yoon serait probablement détenu pendant toute la durée de son procès.
Toujours officiellement président
Il est accusé d’avoir déstabilisé son pays en instaurant par surprise la loi martiale le 3 décembre, un coup de force toutefois vite contrecarré par les députés, au sein d’un Parlement cerné par des soldats. D’après lui, cette mesure était destinée à protéger la Corée du Sud des « forces communistes nord-coréennes » et à « éliminer les éléments hostiles à l’Etat ».
Il a été arrêté le 15 janvier dans sa résidence officielle, une première en Corée du Sud pour un chef de l’Etat en exercice.
L’Assemblée nationale a voté le 14 décembre une motion de destitution contre lui, provoquant sa suspension. Il reste toutefois officiellement le président, seule la Cour constitutionnelle ayant le pouvoir de lui retirer son titre. Dans cette procédure parallèle aux enquêtes en cours, cette juridiction a jusqu’à la mi-juin pour le démettre définitivement ou décider de le rétablir dans ses fonctions.