Le dispositif d’aide à la rénovation des logements pour les particuliers devrait faire les frais d’un budget restreint.
L’enveloppe pourrait être amputée de 700 millions d’euros, et les débats qui reprennent mardi à l’Assemblée préciseront ce chiffre.
Le gouvernement travaille par ailleurs à une fusion entre MaPrimeRénov’ et les certificats d’économie énergie. Avec quelles conséquences pour les Français ?
La ministre du Logement, la ministre de la Transition écologique, les acteurs du bâtiment… depuis des mois, tous plaident pour la stabilité des dispositifs d’aide à la rénovation énergétique. Car les nombreux allers-retours depuis quelques années, entre le périmètre des aides et leur montant global, freinent les chantiers, et place la France en dehors des clous pour atteindre ses objectifs de rénovation énergétique. Or, la mesure est essentielle pour le climat (les émissions de gaz à effet de serre liées aux bâtiments ont augmenté entre 2023 et 2024), pour le portefeuille, mais aussi le confort des Français logés dans des passoires énergétiques.
Mais 2025 ne devrait pas être placée sous le signe de la stabilité. Le budget, déjà en baisse dans la version prévue par le gouvernement Barnier (de 4,5 à 2,3 milliards d’euros) va encore fondre. Plusieurs sources gouvernementales confirment à TF1info les informations parues dans Le Parisien (nouvelle fenêtre) ce week-end : Bercy table sur une baisse de 700 millions des crédits de paiement pour l’année en cours.
Moins d’argent pour les mono-gestes ou les rénovations globales ?
Soit un budget de 1,6 milliard d’euros qui compromet, selon de nombreux acteurs de la rénovation énergétique, les chantiers de 2025. « On ne pourra pas financer et la rénovation globale et les mono-gestes« , réagit ainsi Audrey Zermati, chez Effy, spécialiste de la rénovation énergétique.
Il existe trois types de rénovations : la rénovation d’ampleur, avec des travaux qui permettent de sauter au minimum deux classes dans le diagnostic de performance énergétique (DPE), la rénovation performante qui permet d’arriver à une classe énergétique A ou B, et la rénovation globale, qui permet d’atteindre une rénovation performante en moins de 18 mois. Mais à ces travaux, s’ajoute la possibilité de faire financer des mono-gestes : les particuliers peuvent obtenir une aide pour changer leurs fenêtres, isoler leurs murs ou leurs sols, changer leur système de chauffage, par exemple.
L’aide pour ces mono-gestes avait été supprimée puis remise sous le gouvernement Attal, après une campagne des organismes professionnels qui jugeaient que cela freinait les travaux, les Français étant plus enclins à faire des petits travaux qu’à mener des gros chantiers. Et elle avait été reconduite par un arrêté publié in extremis entre la censure du gouvernement Barnier et la démission du Premier ministre. Celle-ci n’est pas remise en cause : les mono-gestes demeureront financés en 2025.
Une fusion entre MaPrimeRénov’ et les certificats d’économie d’énergie, pour quoi faire ?
Mais la question demeure : avec quel budget, en raison de ce coup de rabot ? Dans l’entourage de la ministre du Logement, Valérie Létard, l’espoir demeure de faire diminuer la baisse envisagée. La réponse se trouve à l’Assemblée nationale, où un débat doit se tenir sur ce sujet.
Par ailleurs, le gouvernement travaille à un projet de fusion entre MaPrimeRénov’ et les certificats d’économie d’énergie (CEE), système qui existe déjà pour les rénovations d’ampleur, avec plusieurs gestes de travaux. Cette fusion viserait à faire financer par les CEE les mono-gestes des particuliers.
Cela revient à réduire la part de l’argent public dans la rénovation énergétique
Cela revient à réduire la part de l’argent public dans la rénovation énergétique
Vincent Legrand, le président de Dorémi, une structure spécialiste de la rénovation performante
Ce sont les fournisseurs d’énergie qui proposent ces CEE aux consommateurs, cela figure dans leurs obligations à réaliser des économies d’énergie. Le consommateur souhaitant faire des travaux peut d’ailleurs déjà se tourner vers un fournisseur – Engie, EDF ou autre – et obtenir une prime pour financer ses travaux. « C’est un gros chantier, qui n’aboutira pas avant six à neuf mois« , précise l’entourage de Valérie Létard.
Cette fusion a-t-elle une conséquence pour les consommateurs ? Du côté du gouvernement, on plaide pour une simplification du dispositif, avec un seul guichet. Mais certains s’interrogent. « Cela revient à réduire la part de l’argent public dans la rénovation énergétique, commente Vincent Legrand, le président de Dorémi, une structure spécialiste de la rénovation performante. On fait payer via les CEE et les fournisseurs d’énergie la politique publique d’efficacité énergétique. »
Une répercussion sur les factures ?
D’autant qu’il manque deux garanties : d’abord, que l’enveloppe des CEE soit suffisante pour financer les travaux (elle doit être actualisée au 1ᵉʳ janvier 2026), ensuite, que cette hausse du recours aux CEE n’entraîne pas une augmentation, de la part des fournisseurs, des factures de gaz, électricité, fioul. Car les CEE ont aussi été évoqués par le gouvernement pour financer le leasing social pour les voitures électriques, trop cher à soutenir via le budget classique.
« Les CEE ne sont pas de l’argent magique, commente un conseiller ministériel. Si on va faire une fusion CEE-MaPrimeRénov’ pour les mono-gestes, il faut revaloriser les CEE, sinon ça ne fonctionne pas. Il faut aussi veiller à la façon dont ça se répercute sur les factures. »
Chez Dorémi, Vincent Legrand va plus loin : « Il n’y a pas besoin de fusionner les deux dispositifs, il faut simplement arrêter de faire des mono-gestes. »
Sur ces chantiers, il a vu nombre d’exemples où une rénovation par exemple sur le seul système de chauffage – avec l’installation d’une pompe à chaleur – s’avérait inefficace, voire problématique : si d’autres travaux de rénovation énergétique sont menés, la pompe à chaleur devient surdimensionnée pour le logement, et les factures restent élevées.
« Pourquoi on finance des travaux que l’on appelle rénovation énergétique, avec des fonds dédiés à la transition énergétique, quand on sait qu’ils n’apportent rien sur ce sujet ?, s’interroge le président. La France n’a plus les moyens de dépenser de cette façon. »