L’humour, ça aide à briser la glace. Pendu à ses piolets et accroché à une paroi glacée par ses crampons, Victor (toutes les personnes interrogées ont requis l’anonymat) plaisante sur sa performance d’escalade, qui mériterait bien – et pourquoi pas ? – une augmentation. « N’oublie pas de rentrer les fesses et de coller ton corps à la paroi », lui crie d’en bas Nicolas, le guide de haute montagne, plus pragmatique, qui accompagne le groupe de grimpeurs. A son collègue Hamza, qui l’assure en rappel, Victor demande du mou pour redescendre. Ses bras le brûlent. A peine revenu à terre, le voilà pourtant qui reprend son ascension. Plus assuré, collé à la paroi, il vise le sommet, puis redescend. Avant de repartir une troisième fois, sûr de lui, à l’assaut d’une cascade de glace beaucoup plus abrupte. Mais, soudain, ses piolets décrochent des morceaux de la paroi glacée. L’un d’eux atterrit dans le cou d’un collègue. Le guide lui intime de s’arrêter. Victor comprend qu’il a voulu aller trop haut, trop vite. Katia, sa n + 1 résume : « C’est tout Victor, ça. Il est très orienté “résultats”, quitte à être un peu bourrin. »
L’ingénieur de 37 ans, chef de projet dans une grande entreprise du nucléaire, est arrivé de Paris quelques heures plus tôt seulement, avec treize de ses collègues. Sa cheffe, Katia, 30 ans, a organisé pour son équipe un séminaire d’alpinisme de trois jours dans la vallée de Chamonix (Haute-Savoie). Le programme est resté secret jusqu’au bout, pour ne pas effrayer les participants, et aussi pour s’ajuster aux conditions météo, intenses, en cette fin janvier.
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