Après l’ordre d’évacuation donné par la justice, les forces de l’ordre sont intervenues mardi 18 mars à la Gaîté-Lyrique, à Paris, pour évacuer ce lieu culturel occupé depuis plus de trois mois par des centaines de jeunes migrants, ont constaté des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP). Dans le cadre de cette opération houleuse, 46 personnes ont été interpellées, a signalé le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, précisant que l’une d’elles l’avait été pour « outrage et rébellion » et que les autres feront l’objet de « vérifications administratives ».
Des policiers et des gendarmes ont repoussé peu avant 6 heures un cordon formé devant le théâtre par des militants soutenant l’occupation, selon les journalistes sur place. Les forces de l’ordre sont ensuite entrées à l’intérieur de l’édifice situé dans le 3e arrondissement de la capitale, pendant que les jeunes migrants sortaient du bâtiment avec leurs affaires personnelles pour se diriger vers une rue adjacente.
Vers 8 h 30, une source policière a expliqué que l’évacuation de la Gaîté-Lyrique, qui appartient à la Ville de Paris, était terminée, ajoutant que la salle de spectacle « pourra[it] être restituée à ses gestionnaires ». Peu avant 9 heures cependant, les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants encore présents aux abords du bâtiment, selon un journaliste de l’AFP.
« Il y a eu une panique et un mouvement de foule, de jeunes migrants et des militants sont tombés par terre, se sont fait marcher dessus », a témoigné David, un militant qui n’a pas donné son nom, parlant de « plusieurs blessés ».
« La solution n’est pas de nous déplacer »
La députée de Paris inscrite dans le groupe Ecologiste à l’Assemblée nationale, Danielle Simonnet, présente sur place, a dénoncé auprès de l’AFP une « intervention extrêmement violente ». Les forces de l’ordre « tapent » et « frappent » à coups de matraque, et ce alors que les « jeunes étaient en train de ranger leurs sacs » et que les manifestants étaient « très pacifiques », a-t-elle déploré.
Des agents de la préfecture d’Ile-de-France chargés de l’hébergement d’urgence, vêtus d’une chasuble rouge, sont venus mardi matin à la rencontre des exilés, a constaté un journaliste de l’AFP. Mais la plupart des jeunes migrants refusent les places d’hébergement qui leur sont proposées, « incités en ce sens par les élus et collectifs militants présents », selon une source policière.
« Il y a des places d’hébergement qui ont été proposées ce matin, certaines à Paris et d’autres ailleurs, sur lesquelles il y a un refus », a confirmé la maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo, sur France Inter.
Dans un communiqué, le Collectif des jeunes du parc de Belleville, qui regroupe certains des jeunes exilés présents à la Gaîté-Lyrique, fait valoir que « l’Etat ne propose que des places temporaires et en régions [province] ». « La solution n’est pas de nous déplacer ailleurs », poursuit-il.
« Risque élevé en cas d’incendie »
La préfecture de police, invoquant un « trouble à l’ordre public », avait annoncé lundi l’évacuation imminente de ce lieu occupé depuis le 10 décembre par de jeunes migrants – jusqu’à 450 environ – demandant à être hébergés. L’établissement avait annulé sa programmation culturelle le 17 décembre, se disant compréhensif et dénonçant « à la fois l’occupation et l’inaction des autorités ».
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Saisi par la Ville de Paris, propriétaire du théâtre, le juge des référés du tribunal administratif de Paris avait estimé, le 13 février, que l’occupation illicite des locaux « fait courir aux jeunes majeurs un risque élevé en cas d’incendie, ainsi qu’un risque sanitaire lié à la promiscuité et un risque de troubles à l’ordre public », selon un communiqué.
Il avait ordonné l’évacuation dans un délai d’un mois. Mais la Mairie de Paris avait expliqué qu’elle ne ferait pas appel à la force publique, affirmant avoir lancé cette procédure pour forcer l’Etat, compétent en matière d’hébergement d’urgence, à « prendre ses responsabilités ».