« Si je pars, est-ce que je pourrai revenir voir les gens ici ? », demande Titi (prénom d’emprunt). Agé de 62 ans, il est arrivé huit mois plus tôt dans cette unité du Samusocial de Paris qui accueille des sans-abri nécessitant des soins de santé, et s’y plaît. Alice Grignon, travailleuse sociale, lui promet qu’il pourra revenir en visite. De précédents rendez-vous ont été consacrés à ouvrir les droits à la retraite et à diverses aides de cet homme sympathique et discret, qui s’est retrouvé à la rue après s’être occupé plusieurs années, à temps plein, de ses parents en fin de vie. Il s’agit désormais de l’aider à trouver un endroit où vivre. « Le mieux me semble d’intégrer une résidence autonomie. Vous auriez votre propre studio, avec vos clés, au lieu de partager une chambre. Personne n’aurait le droit d’entrer chez vous », décrit la travailleuse sociale. Lui qui s’imaginait plutôt en centre d’hébergement accepte qu’elle l’emmène voir une telle résidence.
Alice Grignon est l’une des coordinatrices de la mission Interface du Samusocial de Paris, qui accompagne vers un logement ou un établissement médico-social des personnes âgées sans domicile. Celles-ci représentaient déjà près de 19 % des personnes accueillies en centre d’hébergement dans la capitale en 2016, et leur part semble avoir encore progressé : « Depuis le Covid, il y a de plus en plus de personnes âgées nouvellement à la rue, parce qu’elles ont été expulsées de leur logement », observe le responsable de la mission Interface, Thomas Baude.
Le constat est partagé par l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss), qui a publié une étude sur le sujet, le 9 avril. Au niveau national, il y aurait « entre 30 000 et 40 000 » personnes de plus de 60 ans dans les structures d’hébergement d’urgence, qui « n’arrivent pas à les prendre en charge convenablement », a estimé Gilles Desrumaux, président du groupe prévention-hébergement-logement de l’Uniopss. Leurs locaux ne sont pas adaptés à la perte d’autonomie, et leurs équipes ne sont ni qualifiées ni dimensionnées pour préparer des piluliers, donner à manger, aider à la toilette…
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