Première exposition personnelle de l’artiste à Paris, celle de Lorraine O’Grady à la galerie Mariane Ibrahim est aussi la dernière qu’elle ait préparée, puisqu’elle est morte à New York, le 13 décembre 2024. Elle avait 90 ans, mais, dans l’histoire de la création, elle aura longtemps eu 46 ans, son âge quand elle a incarné son héroïne la plus connue, Mlle Bourgeoise Noire. La performance est simple : à partir de 1980, O’Grady se rend à des vernissages, souriante et chic, un diadème dans les cheveux, parée d’une longue robe et d’une cape. Mais celles-ci sont faites de 180 paires de gants blancs cousus ensemble et, si elle tient des fleurs dans une main, elle tient un fouet, blanc lui aussi, dans l’autre.
Or O’Grady est née à Boston en 1934, de parents jamaïcains : afro-américaine, donc. Et, à cette date, les artistes noires sont très peu visibles sur la scène new-yorkaise. L’apparition de Mlle Bourgeoise Noire est ainsi une provocation. Le fouet et les textes antiségrégationnistes qu’elle récite durant sa performance en accentuent le sens. L’action apparaît aujourd’hui comme le signe précurseur d’une révolution non encore achevée. La suite de photographies qui occupe un mur de la galerie a ainsi une valeur historique, comme l’exposition dans son ensemble.
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