Après un premier cafouillage législatif à la fin de 2013, le premier acte des mesures fiscales « anti-meublé » s’est joué avec la loi Le Meur du 19 novembre 2024. Celle-ci a aligné les conditions d’application du régime du micro-BIC sur celles du microfoncier. Mais uniquement pour les meublés touristiques non classés. Elle a ramené le seuil de loyer à ne pas dépasser pour bénéficier de ce régime d’imposition forfaitaire de 77 700 euros à 15 000 euros, et abaissé le taux de l’abattement de 50 % à 30 %. Pour les meublés touristiques classés, ce taux est abaissé de 71 % à 50 % dans la limite de 77 700 euros annuels.
Aucune modification n’est apportée en revanche au régime micro-applicable en cas de location meublée de longue durée, ni au régime réel qui permet à tous propriétaires, tous types de location meublée confondus, d’amortir le logement et les meubles. C’est-à-dire de déduire chaque année, en plus des charges habituellement déductibles, une charge fictive correspondant à la perte de valeur liée au temps et à l’utilisation des biens. Or l’addition de toutes ces déductions leur permet généralement de constater un résultat fiscal nul et donc de ne pas payer d’impôt – ni impôt sur le revenu ni prélèvements sociaux – tant que l’immeuble et les meubles n’ont pas été entièrement amortis, alors qu’avec le régime micro les propriétaires dégagent toujours un résultat « positif » taxable.
Une comptabilité digne d’une petite entreprise
Conséquence ? Les propriétaires dont les recettes dépassent les seuils de loyers désormais en vigueur dans le micro-BIC basculeront automatiquement dans le réel. « Ils vont sans doute perdre en simplicité puisqu’ils devront tenir une comptabilité digne de celle d’une petite entreprise. Mais, en contrepartie, ils risquent d’avoir une bonne surprise puisque certains d’entre eux – ceux qui ne s’étaient jamais interrogés sur l’opportunité d’opter pour le réel – vont se retrouver non imposables pendant une longue période », explique Julien Debels, avocat associé chez Fidal. Ce qui n’était sans doute pas l’objectif recherché par le législateur…
L’autre mesure « anti-meublé », adoptée cette fois dans le cadre de la loi de finances pour 2025, vise à mettre fin au « double avantage » dont profitaient les loueurs en meublés non professionnels. En effet, ces derniers étaient soumis au régime réel puisqu’ils n’avaient pas à tenir compte – à la différence des loueurs en meublés professionnels – des amortissements pratiqués pendant la mise en location du bien pour le calcul de la plus-value imposable lors de sa revente. « Désormais, les amortissements doivent être réintégrés dans la base de calcul de la plus-value, ce qui mécaniquement conduit à constater une plus-value plus élevée », explique Thomas Prud’Homoz notaire associé chez KL Conseil.
Dans les faits, il n’est pas certain que cette mesure sera vraiment dissuasive car dans de nombreuses situations la plus-value échappera à toute taxation. « Ce sera le cas si le bien est transmis par donation ou par succession, au lieu d’être vendu. Ou si avant de revendre le bien précédemment loué meublé, les loueurs l’occupent en tant que résidence principale », précise Baptiste Bochart, juriste chez JD2M. Par le jeu des abattements, la plus-value échappera également à toute taxation si le bien est revendu au bout de trente ans, et seuls les prélèvements sociaux, calculés sur une base réduite, seront dus s’il est revendu après vingt-deux ans de détention.
Cet article a été réalisé dans le cadre des Rencontres de la fiscalité, un événement organisé par Le Monde et Le Cercle des fiscalistes, et avec le soutien de KL Conseil. Il aura lieu à partir de 18 h 30, le 29 avril, à la chambre de commerce et d’industrie de Lille. Accès gratuit sur inscription. Retrouvez le détail de la programmation sur le site.