Tous les patrons le savent, ils sont révocables ad nutum par leurs actionnaires. Sur un signe de tête ou un coup de menton, comme dans l’Antiquité, et parfois sans que leur nom figure sur l’« arrêt de mort ». C’est le sort qu’Emmanuel Macron a réservé au PDG d’Electricité de France (EDF), Luc Rémont. Lapidaire, l’Elysée annonçait, le 21 mars, que « le président de la République envisage de nommer M. Bernard Fontana en qualité de président-directeur général d’EDF ». Sans mentionner son prédécesseur, sanctionné pour son indocilité. Le dirigeant de Framatome avait sans doute cette loi d’airain à l’esprit, lundi 5 mai, alors que l’assemblée générale du groupe devait confirmer le choix présidentiel et le blanc-seing du Parlement.
Pourquoi une telle « attention » des pouvoirs publics, unique dans la sphère publique ? On ne débarque pas un président de la SNCF sous prétexte que les billets de train sont trop chers ; même sensible, le sujet reste une affaire de consommateurs. Il en va tout autrement d’EDF. La production d’électricité est une activité stratégique entre toutes dans la guerre pour la réindustrialisation décarbonée comme pour la vie économique au jour le jour – le récent black-out subi par les Espagnols et les Portugais vient de le rappeler.
Mais le géant français est plus que cela encore, comme si le slogan des années 1990 – « EDF, nous vous devons plus que la lumière » – restait d’actualité : un service public irriguant les régions et très populaire chez les Français à la veille de ses 80 ans. Ce que Bernard Fontana a résumé de cette formule, le 30 avril, lors de son grand oral devant les parlementaires : « EDF n’est pas une entreprise comme les autres. » Une conviction partagée par le gouvernement depuis la sortie de la Bourse et la renationalisation totale du groupe.
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