Le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, tire la sonnette d’alarme, mardi 13 mai. La raison ? Le grand nombre d’étrangers expulsés des Etats-Unis, en particulier des Vénézuéliens et des Salvadoriens, envoyées dans une mégaprison au Salvador.
« Cette situation soulève de graves préoccupations concernant un large éventail de droits qui sont fondamentaux à la fois pour le droit américain et pour le droit international », a déclaré Volker Türk dans un communiqué, citant notamment les droits à la protection contre la détention arbitraire et la torture ou encore les droits à l’égalité devant la loi.
« Les familles avec lesquelles nous avons parlé ont exprimé un sentiment d’impuissance totale face à ce qui s’est passé et à leur douleur de voir leurs proches étiquetés et traités comme des criminels violents, voire comme des terroristes, sans qu’aucun tribunal n’ait statué sur la validité de ce qui leur est reproché », a-t-il indiqué.
Le président américain, Donald Trump, a invoqué, à la mi-mars, une loi de 1798 sur « les ennemis étrangers », jusqu’alors utilisée exclusivement en temps de guerre, pour arrêter des personnes soupçonnées d’appartenir à des gangs et les expulser sans autre forme de procès vers le Salvador. Ce pays d’Amérique centrale a accepté de les incarcérer, pour la plupart au Cecot, une mégaprison de haute sécurité aménagée par le président salvadorien Nayib Bukele pour les membres de gangs, en échange de 6 millions de dollars, selon la Maison Blanche.
« Nous avons pris contact avec les autorités salvadoriennes et nous demandons que l’on nous donne accès au Cecot afin que nous puissions déterminer les conditions dans lesquelles les personnes sont détenues. C’est extrêmement important », a indiqué une porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), Liz Throssell, lors d’un point de presse à Genève.
Crainte de « disparitions forcées »
Selon M. Türk, « la manière dont certaines personnes ont été détenues et déportées – y compris en utilisant des chaînes – ainsi que la rhétorique humiliante utilisée à l’encontre des migrants sont aussi profondément inquiétantes ».
Quelque 142 000 personnes ont été expulsées des Etats-Unis entre le 20 janvier et le 29 avril, indique le HCDH, citant des données officielles américaines. Le sort d’au moins 245 Vénézuéliens et d’une trentaine de Salvadoriens expulsés vers le Salvador reste incertain, ajoute le Haut-Commissariat. A ce jour, aucune liste officielle des détenus n’a été publiée par les autorités américaines ou salvadoriennes.
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Selon le HCDH, de nombreux détenus n’ont pas été informés de l’intention du gouvernement américain de les expulser vers un pays tiers et beaucoup d’entre eux n’ont pas eu accès à un avocat et n’ont pas pu contester la légalité de leur expulsion avant d’être renvoyés. « Compte tenu des circonstances et du risque de violation des droits de l’homme, il peut y avoir des inquiétudes au sujet de disparitions forcées », a souligné Mme Throssell.
Un juge fédéral du Texas a considéré, début avril, que le recours à la loi sur « les ennemis étrangers » pour expulser des immigrés était « illicite ». Des tribunaux et cours d’appel ainsi que la Cour suprême ont également bloqué provisoirement le recours à cette loi, au motif que les personnes expulsées devaient pouvoir faire valoir leurs droits.
M. Türk a lui appelé le gouvernement américain « à prendre les mesures nécessaires pour garantir le respect des procédures légales, pour donner rapidement et pleinement effet aux décisions de ses tribunaux, pour sauvegarder les droits des enfants et pour cesser le renvoi de tout individu vers tout pays où il y a un risque réel de torture ou d’autres préjudices irréparable ».