Le député LFI Paul Vannier, corapporteur de la commission d’enquête sur les violences en milieu scolaire, a estimé, jeudi 15 mai, au lendemain de l’audition très tendue de François Bayrou sur l’affaire de Bétharram, que ce dernier avait reconnu avoir « menti » en février lorsqu’il a été interrogé pour la première fois à l’Assemblée sur sa connaissance des faits dans les années 1990.
« François Bayrou, grâce au serment, reconnaît enfin que ses déclarations devant les députés, devant les victimes ces derniers mois, étaient mensongères, étaient fausses, étaient inexactes », a déclaré Paul Vannier sur Franceinfo. « Il avait aussi une stratégie de digression, de confusion, où il a accumulé un certain nombre d’éléments, il faudra, après ces cinq heures trente [d’audition], prendre le temps de les regarder un par un », a expliqué le député, retenant « un enseignement important : oui, François Bayrou a menti à l’Assemblée nationale ».
Tout en dénonçant une commission d’enquête « pas totalement objective » et un corapporteur désireux de « nourrir un procès en scandale » pour « abattre le gouvernement », François Bayrou, qui était ministre de l’éducation quand une première plainte a été déposée il y a près de trente ans, a assuré sous serment n’avoir « pas eu d’autre information » que « par la presse ».
Il avait été interpellé le 11 février par Paul Vannier lui-même, lors des questions au gouvernement, sur sa connaissance des faits à l’époque et avait répondu n’avoir « jamais été informé » des agressions sexuelles à Bétharram, établissement situé près de sa ville, Pau, et où plusieurs de ses enfants ont été scolarisés. « Peut-on accepter un premier ministre qui ment devant les députés quand ils exercent leur prérogative constitutionnelle de contrôle de l’action du gouvernement ? », a interrogé le coordinateur national de La France insoumise, Manuel Bompard, sur le réseau social X. « Pour nous, la réponse est non ! », a-t-il conclu.
Indignation du centre à l’extrême droite
Plusieurs députés, du centre à l’extrême droite, se sont indignés, eux, de la manière dont François Bayrou a été interrogé sur sa connaissance des faits, évoquant une « indécence totale », un « procès stalinien » ou encore une « exploitation assez indigne ».
« J’ai tendance à donner du crédit à la parole publique du premier ministre. En revanche, cette audition m’a mis assez mal à l’aise parce que pour moi, elle ressemblait davantage à un procès de Moscou », a déclaré le vice-président du Rassemblement national Sébastien Chenu, sur TF1. Il a décrit « la nausée » que lui a « inspirée » le député LFI Paul Vannier. « C’est un naufrage », a-t-il ajouté, regrettant l’« instrumentalisation d’un drame (…) pour coller une balle au premier ministre et en coller une autre à l’enseignement catholique ». « Ça me semble d’une indécence totale », a tranché le député d’extrême droite.
Sur Radio J, le chef des députés Modem, Marc Fesneau, très proche de François Bayrou, s’en est également pris à M. Vannier, jugeant « cette façon de traiter les gens assez dégueulasse ». « C’est du stalinisme », a-t-il estimé, évoquant « un procès à charge ». « Il faut qu’on arrête avec les commissions d’enquête » à l’Assemblée nationale « parce qu’on en fait des objets politiques permanents », a-t-il estimé, où « il ne s’agit pas de combattre, il s’agit d’accuser l’autre ».
« Je trouve assez indigne la récupération de La France Insoumise », a déclaré, de son côté, le chef des députés LR, Laurent Wauquiez, sur RTL, jugeant qu’« on n’est pas face à une crise politique, on est face à une crise de société ».
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Beaucoup plus critique vis-à-vis du premier ministre, le patron des députés socialistes, Boris Vallaud, a dénoncé « une entreprise d’enfumage » mise en œuvre par François Bayrou. « Est-ce que, au sortir de cette audition, les Françaises et les Français, les victimes, ont le sentiment d’avoir été éclairés sur ce qui s’est passé ? Ont-ils eu des éléments supplémentaires de compréhension ? Je ne crois pas », a-t-il regretté sur Sud Radio.