Bruno Cautrès, politiste et chercheur au Cevipof (Sciences Po Paris), et Anne Muxel, politiste et directrice déléguée du Cevipof, analysent, dans le livre Le Vote sans issues. Chroniques électorales 2024 (Presses universitaires de Grenoble, 340 pages, 25 euros), le séisme politique né de la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par Emmanuel Macron, le 9 juin 2024. Ils reviennent sur les résultats de leur recherche pour Le Monde.
Comment qualifieriez-vous l’état politique du pays, un an après la dissolution de l’Assemblée ?
Bruno Cautrès : Les premiers mots qui me viennent, c’est l’impasse, la confusion, le brouillard. On a un gouvernement en ordre de marche, un Parlement qui fonctionne bon an, mal an, mais on se trouve dans une impasse. Le regard qui est aujourd’hui porté par les Français sur le système politique est un regard d’étrangeté, car la situation leur paraît étrange et la classe politique, presque étrangère. Comme s’ils avaient tiré le rideau entre eux et la politique, se disant qu’il n’y a plus rien à espérer.
Anne Muxel : La séquence électorale, historiquement inédite, qui a vu s’enchaîner un scrutin européen et des élections législatives n’a pas d’équivalent dans notre vie politique. Elle a pu désarçonner les Français. Durant l’été [2024], la série d’atermoiements politiques qui s’est ensuivie a introduit nombre de questionnements. Depuis, l’état d’esprit des Français oscille entre le doute, l’indifférence et la colère, autant d’affects négatifs. Le sentiment d’une situation politique dans l’impasse et de l’ingouvernabilité du pays domine dans l’opinion. D’où ce qualificatif que nous utilisons d’un « vote sans issues ».
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