« L’idée n’est pas de remplacer les cours » : sur TikTok, des profs donnent leurs conseils à l’approche du bac

• Les épreuves du baccalauréat 2025 commencent vendredi 13 juin.
• Certains lycéens ont choisi de réviser leurs épreuves en regardant des vidéos, notamment sur TikTok.
• Qui sont ces professeurs qui se sont lancés sur les réseaux sociaux ? TF1info a interrogé trois d’entre eux.

Il ne reste que quelques jours aux élèves de terminale pour réviser. Apprendre par cœur, faire des exercices… ou scroller sur les réseaux sociaux. En 2024, les éditions Hatier estimaient que 20% des lycéens en filière générale allaient sur TikTok pour réviser. Pour répondre à cette demande, de plus en plus de professeurs s’improvisent créateurs de contenus, résumant les notions du programme scolaire en seulement quelques minutes.

C’est justement l’aventure dans laquelle s’est lancée Estelle Kollar, aka @wonderwomath (nouvelle fenêtre) sur les réseaux sociaux. Après avoir enseigné les mathématiques pendant 10 ans dans l’Éducation nationale, elle a commencé à faire des vidéos pendant le confinement, poussée par l’obligation de faire cours à distance. « J’y ai tellement pris goût que j’ai commencé à le faire de plus en plus sérieusement », raconte-t-elle à TF1info. Cinq ans plus tard, elle cumule 400.000 abonnés sur TikTok.

Le secret de la réussite : rendre les maths « plus fun ». « C’est une matière qui fait peur, il y a un côté un peu élitiste. Soit on est très bon en maths, soit on est nul en maths. Il n’y a pas de juste milieu. Donc les élèves sont vite effrayés et abandonnent. Là où j’arrive à faire quelque chose de marrant, c’est quand je fais plutôt de la culture générale mathématique, des anecdotes. » En témoigne celle sur les ordres de grandeur, avec un chien et un chat en exemple.

Lev Fraenkel a, lui, toujours aimé créer des vidéos. Dès le début de sa carrière, ce prof de philosophie, à l’origine du compte @serial.thinker (nouvelle fenêtre), fait un constat : « C’est difficile d’intéresser les élèves à cette matière. Je me suis rendu compte que sur 100 copies de bac que je devais corriger, il y en avait peut-être 10 dans lesquelles on pouvait voir que l’élève avait assisté à un cours de terminale pendant l’année. Sinon, on ne retrouve aucune connaissance de cours. »

J’essaie de donner envie aux élèves de choisir la spécialité SVT et de les accompagner dans leur scolarité

Mehdi Ben Nasr, @SVTimeToLearn

Basé à Strasbourg, l’enseignant s’interroge : « Comment faire de la philo un peu différemment, de manière alternative mais tout de même efficace ? » L’idée de créer des vidéos naît dans son esprit. Le principe est simple : des chapitres du programme scolaire résumés en trois minutes chacun. Le bonheur, l’art, la liberté… « C’est très efficace. En un minimum de temps, les élèves ont un certain nombre de connaissances, parfois plus que pendant toute une année de cours où ils ne vont rien retenir. Là, en une heure de vidéo, ils retiennent des choses et ont des notes excellentes », explique Lev Fraenkel.

Certains de ses collègues optent pour des contenus plus créatifs. @SVTimeToLearn (nouvelle fenêtre), de son vrai nom Mehdi Ben Nasr, propose des musiques pour réviser les cours de SVT. Les élèves peuvent ainsi comprendre le principe de la vaccination simplement en apprenant les paroles de la chanson, au son d’une guitare : « Je vais activer ta mémoire immunitaire, si la maladie pointe, ça la fera taire // Qu’il soit inactivé ou atténué, je te l’injecte sans danger, promis juré. »

Une méthode originale qui permet d’attirer des jeunes parfois rebutés par les matières scientifiques (nouvelle fenêtre). « Depuis la réforme du bac, les élèves peuvent choisir leurs spécialités. Les SVT en pâtissent un petit peu, ils peuvent abandonner cette option pour l’économie, les maths ou la physique par exemple. J’essaie de donner envie aux élèves de choisir la spécialité SVT et de les accompagner dans leur scolarité, même ceux qui ont des difficultés. J’avais 9/20 de moyenne générale en terminale et aujourd’hui, je suis professeur donc on peut s’en sortir ! »

Morgan Lechat, qui se cache derrière le compte @monsieurlechat92 (nouvelle fenêtre), essaie lui de varier les contenus proposés pour réviser la physique-chimie. Son but : être « une porte d’entrée vers la science », comme il l’a expliqué lors de son audition par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs. « De manière générale, j’essaie de faire des vidéos sur des sujets de la vie quotidienne car il faut intéresser les gens dès le début pour qu’ils restent. Quand j’étais petit, ce qui m’animait dans la science, c’était d’essayer de comprendre tout ce que je voyais autour de moi », précise-t-il auprès de TF1info.

Dernier sujet qu’il a traité en vidéo ? Le sang, « qui régule son acidité lui-même », apprend-on dans la vidéo de Monsieur Lechat. « J’ai fait l’expérience directement sur mon sang et j’en profite pour redéfinir ce qu’est un catalyseur, pour parler des vitesses de réaction… Qui figurent dans le programme de terminale ! » Autre exemple : expliquer la poussée d’Archimède en allant voir le Ballon de Paris qui mesure la qualité de l’air.

Mais il insiste : « En une ou deux minutes, je ne peux pas tout balayer. Si les élèves ont passé quatre heures à étudier une notion en cours, c’est que ça vaut quatre heures d’enseignement. Une vidéo, ça peut vulgariser mais l’idée n’est pas de remplacer les cours en tant que tel. » L’enjeu est donc davantage de « faire aimer la matière aux lycéens » plutôt que de « remplacer les enseignants au quotidien ».

Une opinion partagée par Estelle Kollar, qui ne veut pas promettre à ses abonnés des notes mirobolantes : « Évidemment, quelqu’un qui a déjà 16 de moyenne, il ne va pas progresser avec des petites capsules vidéo. Mais quelqu’un qui a abandonné, on va lui remettre un pied dans les maths. On va lui redonner goût à ça et lui montrer l’intérêt de cette matière. Une fois qu’on aura semé cette petite graine, il va aller en classe avec un peu plus de curiosité. »

Une réalité dont sont conscients tous les professeurs interrogés par TF1info. Mais sur TikTok, d’autres comptes, qui émanent de simples étudiants ou de personnes sans expérience dans l’enseignement, promettent de faire des miracles. Les erreurs véhiculées sur les réseaux sociaux se retrouvent ensuite dans les copies du bac, de quoi faire perdre de précieux points à des lycéens qui ne voulaient réviser qu’en scrollant sur leur téléphone.