Vêtues de rouge, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dimanche 15 juin dans les rues de La Haye et de Bruxelles pour deux manifestations monstres visant à interpeller leurs gouvernements sur la situation dans le territoire palestinien de Gaza, qualifiée de « génocide ».
Samedi, des milliers de personnes avaient manifesté en France dans le cadre d’un week-end mondial de mobilisations. Quelque 150 000 manifestants ont défilé à La Haye, selon les organisateurs, une mobilisation encore plus forte que celle du 18 mai dans la même ville néerlandaise (100 000 personnes).
A Bruxelles, où l’objectif était aussi d’interpeller l’Union européenne (UE), accusée d’inaction, le cortège a réuni 75 000 personnes selon la police, plus de 110 000 d’après les organisateurs. Ceux-ci ont revendiqué la plus grande manifestation jamais organisée en Belgique en soutien aux Palestiniens.
De nombreuses familles avec enfants
Dans les deux pays voisins, les organisateurs, parmi lesquels Amnesty International et Oxfam, avaient appelé les participants à créer une « ligne rouge » pour Gaza, en portant un vêtement de cette couleur (tee-shirt, écharpe, casquette). Les cortèges ont de fait pris l’allure d’une mer rouge.
A La Haye, où la marche avait pour point d’arrivée la Cour internationale de justice, certains brandissaient des banderoles sur lesquelles on pouvait lire : « Ne détournez pas le regard, faites quelque chose », « Arrêtez la complicité néerlandaise » et « Silence quand les enfants dorment, pas quand ils meurent ».
Les organisateurs ont exhorté le gouvernement néerlandais – qui s’est effondré le 3 juin après le retrait d’un parti d’extrême droite d’une coalition fragile – à faire davantage pour maîtriser Israël. « Plus de 150 000 personnes ici vêtues de rouge (…) veulent simplement des sanctions concrètes pour arrêter le génocide à Gaza », a déclaré Michiel Servaes, directeur d’Oxfam Novib. « Nous exigeons une action de la part de notre gouvernement maintenant », a-t-il ajouté. « Ça doit s’arrêter. Ça suffit. Je n’en peux plus. »
Dans la capitale de l’UE, les manifestants, parmi lesquels de nombreuses familles avec enfants scandaient « Free free Palestine » ou brocardaient le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou. Une affiche montrait son visage surmonté d’un « Recherché pour crimes contre l’humanité ».
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Aux Pays-Bas, le premier ministre démissionnaire Dick Schoof a réagi sur X : « A tous ceux qui sont à La Haye, je dis : nous vous voyons et nous vous entendons. » « En fin de compte, notre objectif est le même : mettre fin aux souffrances à Gaza au plus vite », a-t-il ajouté. Des élections provoquées par la chute du gouvernement sont prévues le 29 octobre.
Marche citoyenne Paris-Bruxelles
Depuis Paris, une dizaine de marcheurs issus de la société civile, dont la comédienne française Corinne Masiero, se sont élancés dimanche depuis Paris derrière la banderole « Gaza : stop génocide, l’Europe doit agir ! » pour rallier Bruxelles et exiger des autorités européennes des sanctions contre Israël.
« Nous voulons faire entendre la voix de la société civile pour rappeler à l’Union européenne ses devoirs », notamment celui de « défendre la démocratie et l’état de droit » et de « faire respecter les décisions des cours internationales », a résumé auprès de l’AFP Nathalie Tehio, présidente de la Ligue des droits de l’homme.
L’organisation est co-organistatrice de l’initiative, lancée avant l’escalade militaire entre Israël et l’Iran, aux côtés notamment de la CGT et de la Fédération internationale pour les droits humains.
L’idée est qu’ainsi « peut-être s’enclenche la fin de l’impunité pour Israël » en Cisjordanie occupée et dans la bande de Gaza, ravagée par plus de vingt mois de guerre déclenchée par l’attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël, ajoute Mme Tehio.
Les marcheurs espèrent qu’une délégation sera reçue à Bruxelles le 23 juin, date à laquelle doit se tenir un conseil européen des ministres des Affaires étrangères « où justement la question de la suspension de l’accord avec Israël peut être décidée », selon elle.
Risque de famine
Israël a lancé des attaques depuis vendredi contre l’Iran qu’elle soupçonne de vouloir se doter de l’arme nucléaire. Ce pays avait repris son offensive à la mi-mars sur la bande de Gaza, et intensifié ses opérations militaires le 17 mai, dans le but affiché d’anéantir le mouvement islamiste palestinien Hamas, libérer les derniers otages restants et prendre le contrôle du territoire.
L’ONU a mis garde le 30 mai contre un risque de famine dans toute la bande de Gaza en raison d’un blocus humanitaire. L’attaque lancée le 7 octobre 2023 en Israël par le Hamas a entraîné la mort de 1 218 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’Agence France-Presse (AFP) basé sur des données officielles.
En représailles, Israël a lancé une campagne militaire qui a tué plus de 54 600 Palestiniens, majoritairement des civils, selon des données du ministère de la santé du gouvernement du Hamas pour Gaza, jugées fiables par l’ONU.
En janvier 2024, la Cour internationale de justice (CIJ) a appelé Israël à prévenir tout acte de génocide. Le chef des opérations humanitaires de l’ONU a aussi exhorté mi-mai les dirigeants mondiaux à « agir pour empêcher un génocide ».