La CFDT, première confédération syndicale française, a décliné, vendredi 27 juin, l’invitation faite par le gouvernement aux partenaires sociaux de reprendre des discussions, jusqu’à la mi-juillet, pour un accord sur les retraites, dans l’espoir d’en tirer bénéfice lors du débat budgétaire de l’automne.
« Nous ne voulons pas de nouvelles séances de négociations », alors que « le conclave est terminé depuis lundi », a annoncé à l’Agence France-Presse la secrétaire générale de la CFDT, Marylise Léon, à l’issue d’un bureau national.
Elle a précisé que les deux ultimes points de blocage relevés par François Bayrou pour parvenir à un accord avec le patronat, sur la pénibilité et le financement global du système, étaient « deux éléments extrêmement importants et structurants des discussions ».
« Si les organisations considèrent que ça n’est plus leur heure et qu’il faut trancher, on tranchera », a répondu le premier ministre en marge d’un déplacement à Briançon (Hautes-Alpes) sur les Jeux olympiques d’hiver de 2030. Dans le projet de budget de la Sécurité sociale, « il y aura un texte, qu’il y ait eu un accord préalable ou qu’il y ait eu seulement les travaux préparatoires à un accord », a-t-il ajouté.
« Il faut aller au bout de cet accord »
La CFDT est l’une des trois organisations – avec la CFTC et la CFE-CGC – à avoir discuté jusqu’au terme du « conclave » lancé par le premier ministre pour amender l’impopulaire réforme de 2023. Les négociations, qui devaient à l’origine se conclure à la fin de mai, ont pris fin lundi sur un constat de désaccord avec le Medef et la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).
Mais le gouvernement les a invités à continuer à discuter, en fixant à la « mi-juillet » le nouvel horizon pour aboutir. « S’il faut vingt-quatre heures de plus, peut-être qu’il faudra trois jours de moins, mais il faut aller au bout de cet accord », a expliqué, vendredi, la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas.
« A la mi-juillet, nous avons tous bon espoir que nous arrivions » à un accord sur les points d’aménagement de la réforme de 2023 restant en suspens : la pénibilité et le financement des mesures, a-t-elle affirmé.
Jeudi devant la presse, François Bayrou avait défendu des « avancées » déjà actées, comme une amélioration du calcul de la retraite pour les femmes ayant eu des enfants ou un abaissement de l’âge de départ sans décote, à 66 ans et demi contre 67 ans actuellement. Evoquant le travail des négociations « remarquablement utile », il a jugé un compromis final « à portée de main » sur la pénibilité. Sans définir de cadre pour ces nouvelles discussions.
Prudence des partenaires sociaux
Après la prise de parole du premier ministre, les partenaires sociaux s’étaient montrés très prudents sur les chances de relancer un processus n’ayant pas abouti après quatre mois de discussions et quelques départs – CGT et FO côté syndical, U2P côté patronal.
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Tout en promettant de faire « ses meilleurs efforts », le président du Medef, Patrick Martin, a observé que « les points de désaccords qui subsistent seront évidemment les plus difficiles à régler ». Patronat et syndicats sont « sur deux idées complètement différentes » sur la question cruciale de la pénibilité, a abondé Eric Chevée, négociateur de la CPME.
Le leader de la CFTC, Cyril Chabanier, avait aussi rappelé dès jeudi que « les négociations sont terminées » pour le moment, tout en soulignant : « Si le patronat passe un coup de fil en disant on est prêt à faire un dernier effort sur la pénibilité, on décrochera. »
Pour Marylise Léon, « si le gouvernement veut trouver une voie d’équilibre », cela ne peut se faire « sans la réparation sur la pénibilité, avec le dispositif qu’on a proposé », refusé par le patronat.
Maintien de la motion de censure du Parti socialiste
En chute abyssale dans les sondages, en sursis jusqu’à la discussion budgétaire de l’automne, où le Rassemblement national (RN) notamment menace de le censurer, François Bayrou assure qu’il entend traduire dans la loi toute « disposition de compromis ».
Une manière d’assurer à la CFDT, proche des socialistes, que chaque pas vers le patronat sera utile, ce dernier étant encouragé par ailleurs à assouplir ses positions.
« Les syndicats ont fait preuve d’une grande responsabilité. J’attends du Medef qu’il y ait une part d’effort qui soit faite ! », a tancé sur Sud Radio Marc Fesneau, le chef des députés du MoDem, un proche du premier ministre.
Une manière aussi de prendre à revers les socialistes, qui ont annoncé maintenir leur motion de censure déposée après l’échec du conclave. « Je trouve assez curieux (…) que le Parti socialiste dépose une motion de censure sur une question sociale », a fait mine de s’étonner Mme Primas. De fait, le RN ayant répété qu’il ne la voterait pas, le premier ministre sait qu’il restera à Matignon encore au moins jusqu’à l’automne.